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[RP] La boîte à souvenirs - Histoire de Paul et Victoria -

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Message par Victoria Dim 8 Jan - 11:57

La boîte à souvenirs
- Histoire de Paul et Victoria -
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[RP] La boîte à souvenirs - Histoire de Paul et Victoria - Empty Re: [RP] La boîte à souvenirs - Histoire de Paul et Victoria -

Message par Victoria Mar 10 Jan - 15:39

- Les baisers vassaliques -
Septembre 1654




Paul Chesnay-Taillandier a écrit:Après Esteban, c'est au tour de Anne de prêter serment. Ainsi pourra-t-elle ensuite continuer à veiller au bon déroulement de la cérémonie.

Il est des instants dans la vie d'un dirigeant où ce qui tient du protocole doit rester protocolaire. Le baiser vassalique en est un.

C'est facile à dire quand il s'agit d'un baiser donné par un homme à un homme. Cela provoque tout au plus une légère gêne.

Mais quand est-il avec les dames ? La gêne n'est plus uniquement légère. Et Paul la cache comme il peut en se concentrant sur le fait que c'est le protocole.

Un jour, il faudra changer le protocole.

« Moi, Paul William Arthur du Chesnay-Taillandier, Vice-Prince de Nouvelle-France et Régent du Royaume de France et de Navarre, m'engage à vous apporter, par le maintien de votre fief, protection, justice et subsistance, Madame la baronne de Beaumont-sur-Oise. »

Il adresse un sourire rassurant à Anne. Le message derrière ce sourire ? "Ne vous en faites pas, je ne ferais jamais rien qui pourrait salir votre honneur".

Puis il s'avance et dépose un baiser sur les lèvres de la baronne avant de lâcher ses mains et de la laisser s'écarter pour que la prochaine noble s'avance et prête serment à son tour.
Paul Chesnay-Taillandier a écrit:Les femmes se suivent et ne se ressemblent pas.

Certes, elles sont toutes des femmes fortes et méritantes.

Mais leur histoire personnelle les différencient tellement. L'une est à l'écoute, l'autre au garde à vous, la dernière reste froide et distante.

Et à chaque baiser vassalique la gêne prend une autre couleur.

La Marquise se relève et Paul déclame.

« Moi, Paul William Arthur du Chesnay-Taillandier, Vice-Prince de Nouvelle-France et Régent du Royaume de France et de Navarre, m'engage à vous apporter, par le maintien de votre fief, protection, justice et subsistance, Madame la Marquise de Mortain et Baronne d'Etreham. »

Puis il fait face à sa gêne et dépose un baiser sur les lèvres de Marie-Jeanne avant de la laisser s'éloigner.

La suivante ? Amélia Nivel !

Discrète, dans un coin, la jeune fille assiste à ce ballet des serments. Volontairement, elle ne se mêle pas à la foule qui se tient là, elle n'a qu'une seule hâte : celle de pouvoir retrouver les grands jardins du Louvre pour y respirer un bon bol d'air. Il faudra qu'elle attende son tour comme le lui a si gentiment indiqué Anne qu'elle est heureuse de revoir. Elle lui adresse un joli sourire puis va se poser derrière l'une des larges colonnes qui ornent la grande salle. Toutes les paroles qui s'échangent entre le Régent et ses fidèles sujets ne l'intéressent que moyennement car elle sait parfaitement ce qu'est une prestation de serment. Lorsque son joli minois se penche un peu et qu'elle peut voir que Paul embrasse toutes ces jolies dames.... sur la bouche, la voilà à défaillir, à pâlir sensiblement et à se maintenir solidement à la colonne pour ne pas choir au sol avec l'envie de ne plus jamais se réveiller. Son cœur lui fait mal à hurler, à partir en courant. Ses fines mains se maintiennent comme elles peuvent sur ce marbre glacial, ses grands yeux se baissent, sa vie est réduite à néant.

Quelle est cette drôle de coutume ? Font-ils cela en Italie ? Elle ne s'en souvient plus ou ne veut pas se souvenir, elle, tout ce qu'elle voit c'est que celui qu'elle aime est en train de prendre du bon temps en embrassant en veux-tu, en voilà, à tour de bras.




Victoria sait qu'elle ne doit surtout pas hurler comme elle le voudrait, ou aller arracher Paul à cette grotesque mise en scène. Alors, interdite, éberluée, triste, elle s'adosse à sa colonne salvatrice pour ne pas sombrer.

Paul Chesnay-Taillandier a écrit:Jusque là tout se passait très bien. Tout était réglé comme du papier à musique. Jusque là.

Mercedes s'avance et récite son serment. Elle a l'air tellement pressée de recevoir son baiser qu'elle en oublie une partie !

Avant de lui demander de se relever, Paul l'aide à finir.

« Madame la Secrétaire de la Maison du Roi, nous jurez vous fidélité et conseil dans l'administration du Royaume ? Vous engagez-vous à tenir secret tout sujet abordé dans le cadre de vos fonctions de conseiller d'état et à assister à toute réunion et tout entretien y afférant ? »

Ce n'est qu'une fois que Mercedes a répondu par un simple "Je le jure" que Paul l'invite à se relever et prononce lui-même son engagement.

« Moi, Paul William Arthur du Chesnay-Taillandier, Vice-Prince de Nouvelle-France et Régent du Royaume de France et de Navarre, m'engage à vous apporter, par le maintien de votre fief, protection, justice et subsistance, Madame la Vicomtesse de Nivelle. »

Puis vient le moment tant attendu et préparé par la vicomtesse. Et quelle n'est pas la surprise du régent quand il s’aperçoit que ce baiser n'a rien à voir avec tous les précédents ! Le voilà bien embarrassé avec un goût de miel sur les lèvres ! Va-t-il devoir se les lécher pour retrouver son "état naturel" ? Il n'a qu'une certitude : il n'oubliera jamais ce serment.

Heureusement pour Paul, un nouveau déraillement intervient. Ce qui lui permet de cacher son trouble et de reprendre possession de ses lèvres dans leur état naturel d'un coup de mouchoir discrètement administré.

L'un des hérauts est manifestement impatient. Au mépris de tout le protocole, il se présente devant Paul et déclare reconnaître Gabriel en tant que légitime Roi de France et Paul en tant que légitime régent.

Paul jette un regard à Anne. Il ne peut laisser passer cette impudence.

« Monsieur Kernouec. C'est un plaisir en demi-teinte que de vous rencontrer ce jour et de recevoir votre serment de loyauté. Il eut en effet été plus agréable pour moi que vous vous conformiez aux instructions des aides aux cérémonies qui ont reçu leurs directives de Madame le Grand Chambellan, qui est également votre supérieur hiérarchique. Je ferai preuve de clémence pour cette fois mais j'espère qu'un tel incident ne se reproduira plus jamais, Monsieur Kernouec. Puisse Pascal vous guider sur la voie de la sagesse. »

Un aide aux cérémonies vient alors inviter poliment mais fermement le jeune héraut à se retirer parmi les autres invités.

Un instant, il repense à Victoria et à son impatience des premiers jours. Ils ont cette même fougue des jeunes gens qui n'ont pour seul désir que celui de s'investir. Il la cherche des yeux et la trouve adossée à une colonne. La jeune femme ne semble pas bien se porter.

Préoccupé, Paul fait venir Anne auprès de lui avant que sa Secrétaire personnelle ne s'avance pour prêter serment à son tour. Il lui demande alors à voix basse d'envoyer quelqu'un immédiatement s'enquérir du bien-être de la jeune Falcone.

Tandis qu'Anne s'éloigne, Paul attend Hélèna. La séance des baisers est terminée.


Lorsque Anne s'approche de Victoria, instinctivement elle se redresse afin de se présenter le plus dignement possible. Ses larmes sont probablement visibles mais elle les oublie le temps de rassurer la jeune femme sur son état pitoyable avec une incroyable conviction pour que passe l'affreux mensonge :"Je vais bien, je vous remercie". Elle n'avouera évidemment pas qu'elle est au bord de s'effondrer et elle s'en veut déjà d'avoir suscité de l'inquiétude. Elle ne se doute pas que c'est Paul lui-même qui s'enquiert de ses nouvelles puisqu'elle le sait bien trop occupé à distribuer ces maudits baisers.
Si elle savait, elle en serait infiniment heureuse quand bien même cela n'effacerait pas son chagrin du moment mais l’atténuerait tout de même un petit peu.
Et elle, aura t-elle droit à un -->  baiser ?<--

Délicatement, elle lisse les plis de sa robe, adresse un chaleureux sourire à Anne qui, réponse obtenue, s'en retourne à son office du moment. Dans la tête de la jeune fille c'est le monde qui s'écroule mais à présent, elle ne veut plus attirer l'attention une nouvelle fois, alors résolument, elle refuse de regarder du côté de Paul pour ne plus faillir tant qu'elle sera présente dans la salle du trône. Lorsque son tour viendra, elle sera comme de coutume la vraie petite guerrière qui s'avance fièrement et qui combat ses propres maux.


Paul Chesnay-Taillandier a écrit:Anne part en direction de Victoria. Paul concentre son attention sur Hélèna qui se présente devant lui.

Le cérémonial très officiel du serment de noble ne s'impose pas. Alors elle s'avance et plonge dans une longue révérence dont elle ne se relève pas.

Le serment est récité à la perfection.

Un instant de distraction : Paul croise le regard de Anne, et son sourire. Il en conclut que tout va bien pour Victoria et qu'il se fait des idées. Tant mieux.

Paul se re-concentre très vite sur Hélèna et l'invite à se relever en avançant son bras vers le sien. Toujours sans se permettre de le toucher.

Une fois qu'elle lui fait face et le regarde, Paul lui sourit.

« Madame de Lhavilland, nous sommes ravis de vous compter parmi nous au Conseil d'Etat. »

Il le dit en toute sincérité puisqu'il sait déjà tout le dévouement dont elle fait preuve quand il vient lui demander quelque chose.

Puis Hélèna s'éloigne. C'est au tour de Victoria de s'avancer.

A peine éloignée, la douce Anne revient vers elle. Se peut-il que la jeune femme n'ait pas cru à son énorme mensonge ? Saperlipopette ! Il va lui falloir apprendre à mentir comme un arracheur de dents pour être crédible dans l'avenir. Lorsque Victoria comprend que c'est à son tour de s'approcher du Régent pour recevoir son baiser rien qu'à elle pour prêter serment, elle ne sait pas si elle est soulagée ou au contraire terriblement angoissée de croiser le regard du beau Paul.

Aimablement, elle incline la tête en direction de Anne afin de lui signifier qu'elle a bien compris, puis hésite à obtempérer juste quelques secondes qui lui semblent être des heures. Comme un rituel, là voilà à faire deux fois le tour de sa chère colonne en laissant doucement glisser sa fine main sur celle-ci avant de s'avancer avec grâce, le port de tête haut.

La jeune Secrétaire d'État approche du Trône et retient son souffle. Trois petits pas sont faits, elle marque sa première révérence, puis trois autres petits pas, sa seconde révérence et enfin les trois derniers pas qui la sépare de la distance réglementaire d'avec le Régent. Cette fois Victoria s'incline une dernière fois en une belle révérence marquée qui la fait se ployer jusqu'au sol en prenant bien soin que les plis de sa robe soit maintenus du bout des doigts, délicatement de chaque côté comme l'exige l'étiquette. Quand bien même elle est encore sous le choc de ce à quoi elle a assisté, elle se refuse à montrer la moindre émotion et c'est d'une voix douce mais avec de l'assurance dans le ton employé qu'elle prête serment. Quoi qu'elle pense en cet instant, elle a parfaitement conscience que ce serment est important pour elle, pour le jeune Roi ainsi que le Régent.


Moi, Demoiselle Victoria Falcone, Secrétaire d’État aux Affaires Étrangères, reconnais le Roi Gabriel Premier comme légitime Roi de France et de Navarre, et lui jure fidélité et conseil dans l'administration du Royaume.
Je m'engage à tenir secret tout sujet abordé dans le cadre de mes fonctions de conseiller d'état et à assister à toute réunion et tout entretien y afférant.



Ses grands yeux n'ont pas encore croisés ceux de Paul puisqu'elle reste dans sa position initiale de révérence afin qu'autorisation de se relever lui soit accordée.
L'on pourrait presque entendre les battements de son cœur résonner dans sa poitrine qui se soulève à chaque respiration, quelques douces et très discrètes effluves vanillées papillonnant subtilement jusqu'au Trône  ...


Paul Chesnay-Taillandier a écrit:Il a d'abord pensé qu'elle était malade. Puis Anne l'a rassuré.

Maintenant il pense qu'elle hésite. Serait-ce donc du stress ? Trop de pression sur ces frêles épaules ?

Paul se met à douter.

Puis finalement Victoria s'avance. La tête haute. Le maintien droit et fier. Elle fait face à ses angoisses et accepte la lourde tâche que veut lui confier le régent.

C'est comme ça que Paul le perçoit en tout cas. Son visage affiche un léger sourire face à cette démonstration de courage.

Après le miel, la vanille. Une nouvelle fois, Paul est interpellé par ses sens par un membre de la famille Falcone. Serait-ce de famille ?

Il n'en retire aucune gène et se contente d'apprécier ces saveurs des îles.

Victoria s'incline et prononce son serment. Finit-elle de compter les pierres sur les chausses du régent ?

Puis il l'invite à se redresser comme il l'a déjà fait quelques mois auparavant, la première fois qu'ils se sont rencontrés : il tend son bras vers le sien sans se permettre de le toucher.

Une fois face à face, Paul adresse à Victoria un regard empli de confiance.

« Mademoiselle Falcone, puisse votre jeunesse pétillante redonner à la diplomatie le souffle de vie dont elle a tant besoin. »

Son regard sonde quelques secondes celui de Victoria pour essayer d'y lire quelque chose qui le rassurerait sur les tourments de la jeune femme.

Mais ce temps est presque imperceptible. Ils ne sont pas là pour ça.

Alors Victoria s'éloigne et Maria s'avance à son tour.
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Message par Victoria Mar 10 Jan - 15:58

"Je vous emmène au bout du monde."

Octobre 1654






Paris, 9 octobre 1654 au petit matin dans sa demeure parisienne



*Graziella ! No, no e no ! ho promesso di viaggiare leggero !*
Une seule malle de grâce ! Non, pas de fanfreluches inutiles, j'ai promis !
Non, cela non plus, oubliez !
Ah oui un manteau fourré, voilà une bonne idée, je crains que ce lieu ne soit venteux à souhait.


Elle s'active pour les derniers préparatifs de ce voyage tellement improbable qu'elle n'en revient toujours pas. Elle et lui, seul à seul ...  Avec ces simples mots prononcés dans son bureau du Louvre : "Je vous emmène au bout du monde."
Comment le Régent a t-il pu percevoir que ce moment était celui qu'elle espérait ? La jeune fille de nature fort discrète n'a jamais rien laissé transpirer des sentiments qui sont les siens. Du reste, jamais elle ne s'en ouvrira car elle n'est que la Secrétaire d’État et ne s'imagine même pas possible que ses sentiments puissent être partagés. Alors, elle accomplira ce qu'elle a à accomplir, en la compagnie précieuse du Régent sans jamais se laisser déborder par ce qui l'anime.
Et puis ce voyage est un voyage dans le cadre d'une mission d'ordre diplomatique donc dépendant de son Ministère. Il ne faut surtout pas qu'elle y voit autre chose. *Non, non ...enfin ... NON !* Songe t-elle rapidement en tentant de se recentrer sur l'essentiel.

Est-ce possible ? La jeune fille presse doucement la cocotte en vélin qui ne la quitte plus, telle une relique sacrée. Celle là même qui passa de ses mains à celles du Régent puis de nouveau dans les siennes. En y songeant, elle sourit au comment la cocotte lui est revenue. Instant délicieux mais qui fut pourtant l'objet de ses premières larmes contenues.

Fin prête, la seule et unique malle est chargée dans le carrosse qui contiendra également les malles du Régent.





Dans la cour du Louvre - Une heure plus tard -

Victoria a chassé ses pensées secrètes, du moins pour l'instant et ne souhaite que profiter de ce voyage et de ce qui en découlera. D'abord et avant tout : une première mission diplomatique.
Carpe Diem a préconisé le sage Horace. Cela vaut aussi pour elle qui n'est pas toujours aussi sage et tempérée qu'il le faudrait, même en pleine réunion du Conseil.

Sans nervosité aucune, ses petits pieds arpentent doucement le pavé de la cour du Louvre. Le Régent, ponctuel comme tout, ne tardera plus ...





* Graziella ! Non, non et non ! J'ai promis de voyager léger !*

Paul Chesnay-Taillandier a écrit:


« C'est qu'un voyage au bout du monde se prépare méticuleusement, Votre Altesse Sérénissime. »


Combien de fois a-t-il entendu cette phrase ?

Victoria, la seule et l'unique, ne l'a prononcé qu'une seule fois.

Mais la Victoria dans sa tête ? Des dizaines de fois !

Paul a très mal dormi. Il s'est réveillé toutes les heures pour vérifier qu'il n'oubliait rien. Vider les trois malles et les remplir à nouveau lui prenait 30 minutes à chaque fois.

La nuit fut donc vraiment très courte et c'est un régent masquant à grand peine ses innombrables bâillements qui se présente dans la Cour du Louvre pour rejoindre Victoria.

Les gardes sont là également. Il reconnaît un visage. Un homme qui l'a accompagné dès ses débuts en France. Il lui adresse un regard reconnaissant.

Paul aime les visages familiers. Autant que faire ce peut, il garde les gens de valeur auprès de lui.

Et en parlant de gens de valeur... Elle s'avance, s'incline, et répète l'exercice deux fois, avant qu'il ne l'invite à se relever sans jamais se permettre de la toucher.

« Mademoiselle Falcone. Quel plaisir de vous voir de si bon matin. Etes-vous prête ? Je crains que la journée ne soit longue. »

Nouveau bâillement.

Cette journée de diligence risque d'être ennuyeuse par sa faute s'il ne se reprend pas ! Ou pire. Il pourrait s'endormir !

Il se tourne vers la voiture et un valet leur ouvre la porte en s'inclinant.

« Après vous chère Victoria... » dit-il en l'invitant du bras à entrer.

Ne serait-ce pas la première fois qu'il l'appelle uniquement par son prénom ?

Tandis qu'elle monte, il regarde les malles à l'arrière. 4 malles. Une seule malle pour la demoiselle ? S'il n'en avait eu qu'une seule, il aurait pu dormir un tout petit peu plus.

A cette pensée, il lance du regard une malédiction à... ses malles ! Puis il tourne la tête vivement pour leur signifier son dédain.

Ce ne sont pourtant que des malles qui n'ont rien fait de mal.

Il monte alors dans la voiture et prend place en face de la jeune femme.

Il avait dit en tête à tête ? Mais un régent n'est jamais en tête à tête. Sauf peut-être dans ses appartements. Là, deux gardes les accompagnent dans la voiture. Les six autres suivent à cheval.

« Saviez-vous que j'ai horreur des voyages en diligence ? Je m'y ennuie terriblement. Prendre la mer est tout autre chose. La mer s'étendant à perte de vue est un spectacle dont je ne me lasse jamais. Avez-vous le mal de mer, mademoiselle Falcone ? »

Bonjour, Votre Altesse Sérénissime.
Je suis prête et je n'ai emporté qu'une seule et unique malle.

Répond-elle, fière d'avoir tenu sa promesse.

Délicatement, sa main se pose sur le bras offert afin de pouvoir se hisser dans le carrosse. La jeune fille prend place tandis que le Régent fait de même en vis-à-vis. Puis voilà que Victoria se retrouve coincée entre deux molosses de gardes ! A sa droite et à sa gauche un homme, inconnu et costaud comme tout. C'est à peine si la jeune fille peut respirer tant elle se sent oppressée par ces chaleurs étrangères. L'ampleur des tissus de sa toilette vient s'étaler sur les genoux de chacun bien qu'elle prenne soin de se faire aussi petite que possible. *Longue journée, dites-vous mon Régent ?* * Ce n'est rien de le dire !* Songe t-elle tandis que ses fines menottes tentent de maintenir ce tissu qui s'étale largement.

Pourtant, aussi inconfortable qu'elle se trouve, elle garde la tête haute et s'arme d'un sourire qu'elle offre au Régent qui vient de lui adresser un somptueux bâillement ! Tellement sous le coup de la surprise de ce voyage  qu'elle n'en a pas imaginé la longueur à bord de ce carrosse. A présent que le départ est donné et que s'ébranle la voiture dans la cour du Louvre pour le quitter et s'éloigner de Paris, elle réalise, qu'en effet, il faudra sans doute meubler ce long trajet qui s'annonce. Pour l'heure, Victoria est encore toute à ce doux "Chère Victoria" entendu pour la toute première fois. Sa spontanéité légendaire a bien failli lui faire répondre
"il mio caro Paolino" mais ouf ....elle n'a rien dit, se contentant de lui sourire.

Le carrosse est à présent engagé sur ces longues routes de campagne qui ne sont pas lisses lisses et qui occasionnent quelques rebonds incroyablement dérangeants lorsqu'on veut maintenir son rang et la bonne convenance. Un véritable exploit. Du reste, les quatre voyageurs font du mieux qu'ils peuvent et tentent de garder bonne figure, surtout Victoria, qui, quelque part, est observée de sa droite, de sa gauche ainsi qu'en face par trois pairs d'yeux dont une pair qui la fait fondre, mignon la chose.
 UN EXPLOIT ... Pour ne pas perdre la face ...


La mer, je l'aime beaucoup ! Son immensité est impressionnante et peut à la fois oppresser tout comme rassurer.
J'en déduis, Votre Altesse Sérénissime, que vous aimez vos moments de solitude et de réflexion, coupé du monde avec Dame Nature pour unique conseillère ?


Quoi ? Il faut bien qu'elle réponde à la question posée, non ? Bon, elle emprunte un chemin de traverse car elle ne va tout de même pas lui dire combien elle fut malade lors de la traversée la menant d'Italie en France ! Pas question !

Le mal de mer ? Oh non !
Je ne suis jamais malade.
Ni sur terre, ni sur mer, Votre Altesse Sérénissime.


Bouhhh la menteuse !

Est-ce pour la punir d'avoir menti ? La voilà plus malmenée que d'ordinaire dans ce carrosse qui avance vers sa première destination, sa première halte. Victoria se trouve projetée vers l'avant... c'est à dire que son buste est irrémédiablement attiré contre celui du Régent. Misère de misère, la voilà bien embêtée tandis que ses grands yeux croisent - de très près - ceux du Régent et qu'elle vieille à ne surtout pas le toucher sous peine d'être trucidée sur place par les deux molosses. Ses fines menottes, instinctivement, se lèvent dans les airs comme si elle s'amusait à faire les marionnettes.
Ainsi font font font, les menottes de Victoria  ! Elles n'ont pas touché le Régent même si elles ...  euh ... non rien .... .


OUPS, je n'aime point la diligence non plus. lui murmure-t-elle au passage.
Dignement, la jeune fille reprend place, aidée par les mains de ses voisins qui lui permettent de retrouver un équilibre, comme si de rien n'était.

Ces routes sont .... La jeune fille se racle doucement la gorge avant de poursuivre. Hum ... hum ...
... Je crois qu'il faudrait songer à rénover les voiries du Royaume de France.


Calmement, la jeune fille remet de l'ordre dans sa toilette, une fois de plus, tandis qu'elle regarde le Régent en faisant mine de n'être gênée en rien. Ce qui bien sûr est tout le contraire. Elle s'en veut de n'avoir pas su rester solidement ancrée sur la moelleuse banquette.

Mais j'imagine que vous avez déjà dû y penser sans attendre une grande catastrophe ?

La catastrophe en l’occurrence, là maintenant tout de suite : c'est elle ! Enfin, au moins aura t-elle pu se délecter du délicat parfum musqué du Régent, l'espace d'un instant.


Paul Chesnay-Taillandier a écrit:La voiture se met en branle et c'est leur monde qui s'ébranle.


« J'en déduis, Votre Altesse Sérénissime, que vous aimez vos moments de solitude et de réflexion, coupé du monde avec Dame Nature pour unique conseillère ? »


« Conseillère ? »

Il sourit. La réponse est toute autre. Le regard de Paul devient vif et perçant. Le chasseur en lui se réveille alors qu'il pense à ses heures passées en forêt.

« Je dirais plutôt que la nature est une amante. J'aime me retrouver dans ses bras. Je ne vais pas chasser pour réfléchir. Bien au contraire. Ces instants me permettent de mettre de côté mes obligations. Ils m'apaisent et me ramènent à un instinct plus animal, bien loin des convenances de la Cour. »

Paul la regarde au travers de ses yeux de chasseur. Si Victoria était un animal, elle serait une biche. Une biche dominante. Vive et attentive au moindre bruit qui pourrait annoncer le danger.

Mais pas assez vive apparemment ! La route a eu raison d'elle. La biche est jetée dans les bras du chasseur dont les muscles se contractent instantanément pour la réceptionner.

A cet instant précis tous les regards sont rivés sur la biche. Va-t-elle réussir à s'échapper ? Aura-t-elle la vie sauve cette fois ? Ou le chasseur l'emportera-t-il ? En fera-t-il son trophée ? Son repas de ce soir ? Les respirations se coupent et...

la biche repart saine et sauve. Qui de la biche ou du chasseur est heureux de cette fin ? L'histoire ne le dit pas.

Le chasseur s'enfonce dans les bois et le régent revient, les yeux rieurs.



« Je crois qu'il faudrait songer à rénover les voiries du Royaume de France. Mais j'imagine que vous avez déjà dû y penser sans attendre une grande catastrophe ? »


« J'ai mûrement réfléchi à la question avant de rejeter ce projet. Voyez-vous, il y a de nombreux points positifs à ces turbulences. Par exemple, moi qui craignais de m'endormir sur la route, m'en voilà bien incapable ! Et puis, il faut avouer que le voyage est bien plus drôle ainsi, plein de rebondissements ! »

Aurait-il fait un jeu de mots ? Pauvre Victoria.

Il poursuit en passant sur le ton de la confidence.

« Je vais vous dire un secret. J'ai remarqué que plus vous tentez de garder le contrôle en raidissant votre corps, plus les sursauts soudain ont de chance de vous déstabiliser. Si au contraire vous vous laissez porter par le rythme de la voiture, vos mouvements sont plus souples et vous serez moins violemment projetée dans mes bras ! »

Attention, il n'avait pas dit qu'elle ne retomberait pas dans ses bras. Juste un peu moins violemment. Au moins les gardes ne soupçonneraient plus une agression.

Après quelques heures, ils firent une halte afin de se sustenter.

Point d'auberge à l'horizon. Et leur sécurité ne pourrait être complètement assurée dans un établissement bondé de monde. C'est pourquoi ils avaient choisi l'option "pique-nique".

Une petite table et deux chaises en bois sont dressées pour leur permettre de ne pas être à terre. Ils se mettent à l'ombre pour éviter à la jeune femme une insolation et déjeunent enfin, profitant du calme de la campagne.

Puis la route reprend pour quelques heures encore jusqu'à ce qu'ils arrivent enfin en bord de mer, dans un manoir appartenant à la famille royale.

« Ainsi s'achève votre torture de ce jour, Mademoiselle Falcone. » annonce presque solennellement Paul tandis qu'un valet vient ouvrir la porte de la voiture.

Les hommes d'abord ! Car la galanterie veut que l'homme ne se rince pas l'oeil sur le joli popotin de ses accompagnatrices. Mais qu'en est-il de l'oeil des accompagnatrices ?

Les malles sont déchargées et montées dans leurs appartements respectifs.

Paul autorise les gardes à prendre un repos bien mérité. Le manoir a ses propres hommes pour leur permettre de reprendre des forces.

Après un repas en délicieuse compagnie, Paul ne rencontra aucune difficulté à s'endormir. Et c'est aux aurores qu'il fut réveillé par les rayons de soleil venant réchauffer son visage.

Il ne déjeune jamais avant de prendre la mer. Ce gain de temps lui fait prendre de l'avance et le conduit à attendre Victoria non loin de leur navire, ses yeux scrutant la mer comme pour y voir la Nouvelle-France.
Victoria se tourne et se retourne dans ce grand lit qui l'accueille pour cette nuit. Elle n'arrive pas à trouver le sommeil et ce à plusieurs titres. Elle se remémore, d'abord, les conversations tenues avec le Régent et tente d'y percevoir un petit quelque chose qui comblerait ses attentes. Victoria n'est pas une douce rêveuse écervelée et a les pieds sur terre quant à ses charges, sa fonction, mais du haut de ses dix huit printemps, il est sans doute bien naturel que son esprit se libère de temps à autre pour redevenir cette jeune fille qui se surprend à espérer. Qu'espère t-elle donc ? Elle est bien en peine de le dire avec précision et préfère garder "secret" ses rêves les plus doux et ses espérances les plus folles.

Défilent dans la nuit sombre de cette grande chambre, les quelques moments passés avec le Régent. L'homme peut être aussi rieur que, très vite, redevenir l'homme d’État distant. Cette transition rapide est bien souvent déstabilisante. Il faudra sans doute qu'elle apprenne à composer avec, elle n'a guère d'autre choix. Ces journées passées à ses côtés confortent malgré tout, ce qu'elle pressentait. Personne n'y peut rien, c'est ainsi. Peu à peu, Victoria est irrémédiablement, terriblement éprise de l'homme attachant qu'il est, se contentant de respecter grandement le côté "Régent". Ces deux conditions peuvent-elles être séparées ? Voilà bien la grande question ...
L'homme est émouvant, intelligent et fin d'esprit, sensible et rieur. Le chef d’État est strict, soucieux de l'étiquette et des convenances, intransigeant quant au devoir qui est le sien. Victoria comprend parfaitement ce qui l'anime dans cette lourde charge et ne peut que se montrer respectueuse de cette volonté de vouloir diriger le Royaume de France avec rigueur. Existe t-il, comme pour le jour et la tombée de la nuit, le moyen d'une ligne médiane pour ce qui la concerne ? Elle ne peut trouver de réponse et continue de malmener les draps de sa couche.

Et puis, il y a ce gros mensonge s'agissant de son mal de mer. Comment va t-elle pouvoir se montrer fraîche et pimpante si le navire tangue ? Lors du pique-nique, elle n'a fait que picorer de ci, de là, et ce soir au dîner, elle a fait de même en honorant, d'une unique bouchée, chaque met présenté. Elle a d'ordinaire un bon appétit, voire même, elle sait être assez gourmande mais à la perspective de cette traversée, aussi courte soit-elle, il n'est pas question d'encombrer son estomac de trop de nourriture. La jeune fille, forte de sa première expérience, a songé à se munir d'une décoction d'herbes, censée atténuer les nausées ainsi que les vertiges. Cela sera t-il suffisant ? Voici déjà le troisième bol d'un breuvage amer qu'elle ingurgite à petites gorgées.

Le petit matin est déjà là et c'est avec le visage sans marque - vive la jeunesse - qu'elle se hâte de prendre son bain, de s'habiller avec élégance et de refuser poliment la collation qui lui est présentée. A la place, c'est un autre bol de tisane qu'elle avale avec l'espoir que la boisson sera efficace.

Elle doit rejoindre le Régent sur les quais où le Navire doit déjà être là à les attendre. Deux gardes la conduisent et c'est la tête un peu préoccupée par cette traversée à venir qu'elle marche à pas pressés afin de suivre la cadence des gardes royaux.

Les autres gardes sont rangés avec soin derrière le Régent qu'elle aperçoit à présent. Avec douceur, dans un murmure,  elle salue les hommes car ils sont méritants de veiller à leur sécurité.


Bonjour Messieurs.


Puis, elle marque un arrêt. Le Régent se tient fièrement sur le bord du quai, le visage haut avec, sans doute, un regard se perdant vers la ligne d'horizon. Sa belle stature imposante la rassure immédiatement même si elle ne peut le voir que de dos. D'un geste de la main, elle indique aux gardes qu'ils peuvent s'éloigner d'elle.
Elle ne craint plus rien puisqu'il est là.

A son tour, dans un parfait silence afin de ne pas déranger celui qui se tient devant elle, tel un Prince, elle s'évade le cœur battant la chamade, vers ce -->  même horizon <--

 

Paul Chesnay-Taillandier a écrit:L'histoire raconte que, lorsque quelqu'un dans votre dos vous regarde, votre nuque se met à vous picoter.

C'est faux. A cet instant précis, alors que Victoria est juste derrière lui, Paul se sent seul.

Il laisse s'envoler ses pensées dans le vent. Comme un fou va jeter à la mer des bouteilles vides et espérer qu'on pourra y lire SOS écrit avec de l'air.

Diagnostic : le mal du pays.

C'est la première fois qu'il revoit la mer depuis son départ de Nouvelle-France. Si peu de temps s'est écoulé et pourtant tant de choses sont arrivées.

La liberté est un luxe. Pourtant, plus une personne est riche, moins elle a le luxe de pouvoir se l'offrir.

La nostalgie l'étreint alors que ses responsabilités se rappellent à lui par le bruit des hommes sur le pont de leur navire. L'embarquement est proche.

Comme pour se redonner du courage, Paul prend une profonde inspiration et répète la devise de sa famille.



« Que rien n'arrête l'audace et le courage. »


Il se reprend, chasse sa nostalgie, se retourne avec la ferme intention de ne plus se laisser aller et de retrouver Victoria et... sursaute quand il s’aperçoit que la jeune femme est en fait juste derrière lui.

Par réflexe, il porte la main à son coeur qui bat la chamade après la frousse qu'elle vient de lui faire !

« Victoria ! Je... euh... *que dire ? Vite ! Trouve au lieu de rester l'air bête après avoir eu peur aussi sottement !*... Ca fait longtemps que vous m'épiez ainsi ? » demande-t-il sur le ton de la plaisanterie tandis que son petit coeur retrouve un rythme plus approprié.

« Vous êtes prête ? Plus que quelques heures et nous serons au bout du monde, rien que vous et moi, et quelques gardes ! Impatiente ? » demande-t-il, le regard taquin.

Ensemble, ils prennent la direction du bateau pour y monter et s'y installer. Paul avait prévu de s'occuper l'esprit pour ne pas se laisser prendre par le mal de mer. Penser à autre chose aide.

Une fois arrivés dans la cabinet, il se tourne vers Victoria.

« Mademoiselle Falcone. J'ai une faveur à vous demander maintenant que nous ne sommes plus que tous les deux... Voyez-vous, il est nombre de choses qu'un Vice-Prince se doit se connaître. Et mon éducation commença dès mon plus jeune âge avec nombres de disciplines aussi physiques qu'intellectuelles. La lecture et l'écriture évidemment. La danse. La chasse. L'escrime. Les lois, les us et les coutumes. L'histoire. Le protocole. Tant de choses que je ne saurais toutes les citer. Mais il y a une chose que j'aimerais que vous seule m'appreniez. »

Il se tait. Ménage son effet. Son regard cherche dans les yeux de Victoria le reflet de son âme. Si seulement on pouvait y lire les pensées. Il a conscience qu'une certaine complicité est en train de se créer entre eux. Il a conscience que son statut l'éloigne de ce genre de relation. Mais est-ce vraiment pêcher que de vouloir retrouver, l'espace de quelques instants, la sensation de ne vivre que pour soi ? Quel roi ne l'a pas déjà fait ? Aucun.

« Apprenez-moi à faire une cocotte en vélin ! »

Il ne lui laisse pas le temps de répondre et se lance dans une explication vaseuse pour essayer de masquer le fait qu'il a juste envie de savoir comment on fait.

« Où avez-vous appris cela ? Il paraît que cet art demande beaucoup de patience et de maîtrise. Il faut être soigné et savoir prendre le temps nécessaire pour que les choses soient bien faites et que le résultat soit parfait. Apprenez-moi. D'ailleurs, nous concentrer nous évitera d'être indisposés par la mer ! »

L'avantage quand on est le n°2 du Royaume, c'est que même si tout le monde sait que votre excuse est bidon, personne n'osera vous le dire.



[Quelques heures plus tard]

Un homme entre dans la cabine et les informe qu'ils arrivent dans le port de Saint-Pierre-Port. De là, une voiture devrait les attendre pour leur permettre de se rendre jusqu'au palais princier et d'y rencontrer la Duchesse.

Ces quelques heures de distraction lui ont fait le plus grand bien. Il est prêt à reprendre ses fonctions avec toute l'assurance nécessaire.

C'est la première mission officielle de Victoria. A-t-elle un peu le trac ? Il la regarde furtivement pour essayer de voir ce qu'il en est. Mais la jeune femme est passée maître dans le contrôle de ses apparences depuis longtemps. Il faudrait la connaître par coeur pour savoir comment elle réagit quand elle est stressée.

Alors Paul suppose qu'elle doit l'être. Et en guise de soutien, il lui propose son bras pour aller du navire à la voiture. C'est court. Mais c'est symbolique. Elle n'est pas seule et elle peut lui faire confiance. Il sait ce qu'il fait. On le lui a appris depuis qu'il est petit.

La grosse cloche de l'église retentit et annonce midi lorsqu'ils descendent de la voiture dans la Cour du Palais où ils doivent rencontrer la Duchesse de Saint-Samson.


Combien de temps s'est-elle perdue sur cette ligne d'horizon ? Un très léger sourire se dessine sur ses lèvres rosées car à vrai dire, elle a bien du mal à se soustraire à ses pensées vagabondes. L'air frais de ce bord de mer ne la dérange nullement, pas plus que les bruits alentours. A sa demande, les gardes se sont éloignés en respectant les quelques mètres réglementaires les séparant du Chef d’État. La ligne d'horizon et la stature du Régent sont donc ses seuls points d'attache pour ce moment d'une évasion inattendue.
Aussi, lorsque Paul se retourne et qu'elle entend le son de sa voix, qu'elle observe cette main qui se pose sur un cœur semblant surpris, c'est elle qui bondit légèrement en opérant un léger pas de recul. Voilà l'arroseur arrosé ! Elle en l'occurrence.

Elle est aussi surprise que Paul, sinon plus et se courbe en une belle révérence puisqu'ils ne se sont pas revus depuis la veille. Le temps de cette révérence, sa tête bouillonne pour trouver une parade à la question surprenante qui vient de lui être posée. *L'épier ? Moi ?**Quelle drôle d'idée !*
Ce qui la rassure un peu, c'est d'avoir noté le trouble furtif du Régent qui, vif comme il est, aura trouvé une parade pour la déstabiliser. Pas question qu'il gagne la partie !
Il lui plaît depuis qu'elle le connaît de le savoir taquin avec elle. Elle ne se gênera pas, dans la limite des convenances, pour rebondir chaque fois que l'occasion lui sera donnée. Et .... en voilà une !

Elle s'arme d'un sourire et répond amusée :


Vous épier Votre Altesse Sérénissime ?
Ne trouvez-vous pas que vous avez assez de pairs d'yeux alentours pour le faire à ma place ?
Ne préfèreriez-vous pas voir que mes yeux ne soient que bienveillants à votre endroit ?

Façon détournée de lui faire comprendre que jamais elle ne sera pour lui, source de problèmes ou de médisances, à contrario de certains autres. La jeune fille se doute qu'il n'y a point besoin de réponse. Le Régent enregistre tout et pour longtemps. Sans nul doute sa réaction fera-t-elle son chemin et voilà bien tout ce qui compte pour Victoria.

Je suis prête Votre Altesse Sérénissime.

Le pas assuré, elle le suit donc et découvre cet immense navire qui déjà lui donne des hauts le cœur. Décidément, son adorable Régent aura malmené son petit cœur à maintes reprises depuis le début de ce voyage. Dans le bon sens, enfin ...sauf pour cette traversée qui s'annonce.

Et la traversée commence... Et Victoria se conditionne afin d'évacuer cette peur du mal de mer ! La petite guerrière ne va pas se ridiculiser tout de même ? Facile à dire. La tête chavire bien plus que le bateau - et heureusement-  et il lui faut fournir un terrible effort pour ne pas courir sur le pont ou partout ailleurs où ne sera pas le Régent pour ne pas afficher ce que son corps et ce bateau lui imposent. Par tous les saints de la terre : jamais plus elle ne montera sur un bateau ! Parole de Victoria. Ah mince...il faudra bien qu'elle fasse le chemin à l'envers pour rentrer à Paris ...

Ils prennent place dans un cabinet plutôt agréable. La jeune fille fait face au Régent dans un espace intime et réduit, ce qui est un grand honneur lorsqu'on connaît l'étiquette. Paul ne semble pas être atteint par les quelques tangages et roulis du bateau, ou, tout comme elle, se forge-t-il une carapace de grand guerrier face aux tourments infligés. Il lui offre un visage chaleureux et engage la conversation. Ces moments de partage sont pour elle, aussi précieux que l'air qu'elle respire. Elle l’écoute donc avec intérêt et se trouve une fois encore aussi étonnée que terriblement ravie de ce qu'il lui demande. Ainsi, il n'a pas oublié... Cette cocotte reste et restera réellement leur symbole secret. Elle retient aussi que la vie de Paul enfant n'a pas dû être facile tant la rigueur qu'il affiche dans sa description est présente. Elle aussi, en Italie, n'a pas échappé aux lourdeurs d'un apprentissage que se doivent de recevoir les jeunes filles bien nées. En cela, ils peuvent se comprendre. Elle hoche doucement la tête, lui sourit.


L'enfance d'un Prince n'est pas toujours aussi insouciante que celle de tout enfant du commun des mortels.
Redevenons des enfants insouciants et libres, l'espace d'un instant.


Avec grâce, elle se lève, se dirige vers le bureau de ce petit cabinet et se munit de quelques vélins vierges, retourne prendre place en veillant à ne pas zigzaguer sous l'effet de ce maudit bateau qui poursuit sa route.
Elle pose devant le Régent des vélins et commence son pliage en le commentant avec douceur dans la voix.

Essayez de suivre mes mains et de reproduire mes gestes.

Les trois premiers pliages de base sont présentés, elle patiente afin de voir ce que fera le Régent. Il reproduit à l'identique cette première opération. Elle poursuit donc mais le pliage devient plus ardu et Paul rencontre de la difficulté à se sortir de celui-ci.

Permettez-vous, Votre Altesse Sérénissime, que je guide vos mains ?

Le Régent consent ce qui, une fois encore, est un grand honneur. Il ne faut jamais, ô grand jamais, toucher un Roi pas plus qu'un Régent ! Avec douceur et grande délicatesse les fines mains de Victoria se placent sur celles masculines et puissantes. Ce contact la laisse un moment sans voix et ses grands yeux se fixent un court instant dans ceux de Paul. Elle cherche à ne pas afficher son trouble mais a bien du mal. Puis, elle se ressaisit, déglutit une, deux fois, avec discrétion et commence à diriger ces mains à la peau douce.

Voyez ...ce ... ce .. n'est pas aussi compliqué que l'on pourrait croire...
... N'est-ce pas ?


La cocotte de Paul prend forme et les mains de Victoria ont bien du mal à se retirer de cette douceur partagée. Le bateau peut bien couler qu'elle n'en serait pas affectée puisqu'elle emporterait Paul avec elle ! Mais, mais, mais ... le bateau ne coule pas et Victoria ôte ses mains avec grande douceur en un geste lent et marqué.

Il est temps de rompre le charme et elle ne trouve pas d'autre moyen pour le faire à regret, que de dire en offrant au Régent la cocotte réalisée à quatre mains :

Je propose que nous nommions votre cocotte "Guernesey" !
N'est-elle pas jolie et parfaitement exécutée ?


Instinctivement, la cocotte qu'elle garde contre son cœur depuis cette première fois au Louvre est caressée d'un geste vif mais discret. Ils ont à présent chacun la leur.



Quelques heures plus tard



Le bateau est à quai sur cette Principauté de Guernesey. Si elle a souffert des inconvénients du mal de mer, elle pense que cela ne se sera pas vu ou presque pas. En cela, l'idée de confectionner une cocotte aura été plus que brillante sans compter les moments d'échanges et de conversation que cela aura généré car ce mal de mer se sera au final plutôt bien vécu. Ses premiers pas sur ce sol étranger la ramènent à la réalité. Son voyage diplomatique, sa mission. Le bras offert avec bienveillance est un nouveau signe qui touche Victoria. Sa menotte s'y dépose délicatement et ils avancent de concert vers cette rencontre programmée.

Mon impatience est mesurée Votre Altesse Sérénissime.
Un diplomate se doit de rester mesuré en toutes circonstances.


Ce n'est évidemment pas ce que le cœur de Victoria aurait aimé répondre à cette question précise.
Comment pourrait-elle se montrer impatiente de ne plus être en tête à tête avec Paul ?
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Message par Victoria Mar 10 Jan - 16:14

- Escapade nocturne -

Octobre 1654

Partie 1
Dans sa chambre au Palais - Aux environs de vingt-deux heures -


Voici deux jours qu'elle a foulé le sol de la Principauté de Guernesey. Entre les sorties officielles, les rencontres obligatoires au Palais, les rapports qu'il lui a fallu consigner méticuleusement afin de constituer un solide dossier à destination du Régent et de la Duchesse de Saint-Samson, l'on peut dire que Victoria n'a pas chômé. Elle s'est pliée sans sourciller à ces nombreux dictats que l'étiquette et le sens du devoir lui imposent mais à présent qu'elle se retrouve seule dans cette chambre immense pour sa seconde nuit, Victoria fait les cent pas en cherchant le moyen de pouvoir se soustraire à toutes ces obligations pour quelques heures. Heureusement, la jeune fille est menue et légère comme une plume, ses pas ne risquent donc pas d'alerter qui que cela soit.

Il lui faut trouver le moyen de se carapater des lieux afin d'aller rejoindre son Oncle Sandro à qui elle a donné rendez-vous ce soir précisément. Elle pense à ces retrouvailles depuis qu'elle sait ce voyage programmé. Sa correspondance avec Sandro Falcone ne s'est jamais tarie, Victoria étant très proche de cet Oncle aux mœurs et à la vie atypiques. Sandro est son confident, son père de substitution, elle l'aime tendrement et sans compter.  Le plus difficile à présent, reste de pouvoir échapper à la vigilance constante des gardes qui plantent devant la porte de sa chambre. Sa seule issue : la fenêtre ! Pour cela elle va devoir s'armer de courage et escalader ce haut mur afin de pouvoir espérer se retrouver sur l'herbe des jardins princiers. Voilà deux jours qu'elle s'équipe pour parvenir à ses fins : Corde, tenue appropriée et autres outils nécessaires.

La jeune fille est aussi grisée que paniquée à l'idée de ce qu'elle s'apprête à faire. Après le dîner, elle s'est inclinée respectueusement devant le Régent, lui a souhaité une bonne nuit en sachant pertinemment que sa nuit à elle ne faisait que commencer et de façon incongrue en regard  des nuits précédentes. Elle n'a pas bonne conscience d'avoir menti pour la seconde fois à ce Régent tant aimé mais après tout, ce sont là de tous petits mensonges qui ne risquent pas de nuire au Chef d’État, car cela elle ne se le pardonnerait pas. Indépendamment de sa responsabilité au sein du Conseil d’État, jamais elle ne voudrait que le Régent se retrouve dans une position délicate par sa faute. Bon : escalader un mur et courir l'ile en pleine nuit n'est pas franchement ce qu'il est d'usage de pratiquer pour une jeune fille mais quel mal y a t-il à vouloir rejoindre son Oncle ? Passer par la porte et le recevoir dans les règles de l'art, lui répondrez-vous ! Oui mais non. Sandro ne franchira jamais le seuil du Palais et cela la jeune fille le sait. Alors .... poudre d'escampette et en avant l'aventure !


D'abord : se changer. Pour se faire, Victoria a opté pour une tenue ... d'homme ! La voilà donc à laisser tomber froufrous et dentelles, à se bander les seins avec force afin que sa poitrine se retrouve aussi plate qu'une galette. L'opération est compliquée et douloureuse mais elle est pugnace la petite et rien ne l'arrête. Une chemise à jabot vient recouvrir ce buste à la garçonne, un pantalon, des bottes impeccablement cirées, un long manteau noir recouvrant le tout et des gants en cuir afin que ses fines menottes soient elles aussi masquées. Dernier détail d'importance : cacher sa chevelure blondinette et frisotante ! C'est un large foulard bleu nuit qui fera l'affaire sur lequel elle pose un chapeau d'homme. Si dans le Palais l'on entend hurler : cela sera sans doute le pauvre valet à qui elle a subtilisé cette tenue pour la nuit ! Tout lui sera rendu au petit matin.

Ensuite : s'entraîner à forcir le timbre de sa voix. Tout en se changeant, elle pousse quelques onomatopées afin que sa voix soit plus ferme. Il ne s'agirait pas de se faire coincer pour ce manquement.


 Schcrogneugneu ! Fouchtri fouchtra !
Miminananère ! Nananinanère !



Victoria est fin prête. L'image renvoyée par le psyché est plutôt encourageante. Elle-même ne se reconnait pas. Elle est plutôt mignonnette en homme tout compte fait !

A présent : opération escalade. Elle inspire, elle expire à plusieurs reprises avec tout de même la trouille au ventre. Victoria est une petite guerrière courageuse mais là tout de même ... Elle se penche par l'encadrement de la fenêtre afin de mesurer le chemin à parcourir au bout de cette corde. Pas moins de deux niveaux ! Affolée, elle referme la fenêtre et se remet à arpenter sa chambre par des pas saccadés et nerveux.
Inspire- Expire - Inspire-Expire - De nouveau, elle ouvre en grand les battants de la fenêtre et lance sa corde qu'elle a solidement attachée au pied costaud du grand lit.

Avec souplesse, elle s'agrippe à sa corde salvatrice et commence sa descente. Elle ne se signe pas mais murmure pour se donner du courage :



*Se muoio nella mia caduta, voi non saprete anche quanto che vi amo !*




(A suivre ...)




*Si je meurs dans ma chute, vous ne saurez même pas combien que je vous aime !*


Paul Chesnay-Taillandier a écrit:Tout est de la faute de Rudy !

Qui est Rudy ? Le fidèle golden retriever de Paul voyons...

Son chien l'a suivi depuis la Nouvelle-France et Paul continue à s'occuper personnellement de lui.

Chaque soir, Rudy et lui font une promenade dans les jardins du Louvre. Chaque soir.

Ce soir, Paul n'est pas au Louvre. Et Rudy n'est pas là. Mais le voilà incapable de dormir sans cette petite promenade nocturne.

Il est passé 22h00. La nuit noire est déjà là. Seules les fenêtres du palais éclairent les jardins bien sombres.

Il arpente le chemin longeant le bâtiment. Un garde le suit à un mètre de distance.

Il n'a pas prévu de quitter le cercle sécurisé des jardins. Pour quelle folle raison irait-il gambader dans la nuit dans une ville qu'il ne connaît même pas ? C'est un coup à se perdre, à finir dans une rue malfamée et à tomber sur un coupe-gorge ! Il faut être sacrément frappé pour avoir cette idée !

Ou s'appeler Victoria Falcone.

Alors qu'il se promène tranquillement, une corde est lancée quelques mètres à peine devant lui.

Par réflexe, il s'enfonce dans la pénombre pour ne pas être vu.

Mais que se passe-t-il donc ? Depuis quand lance-t-on des cordes par les fenêtres ?

Les yeux de Paul remontent le long de la corde et finissent leur course sur une silhouette en train de descendre doucement le long de la corde.

Qui est-ce ? Selon l'emplacement de la fenêtre, la silhouette vient de la chambre de Victoria. Mais à en croire la tenue, ce n'est pas une femme qui descend. Ce doit être d'une autre chambre. Un voleur ? Un amant ?

La curiosité de Paul est piquée à vif. Que faire ? S'il hésite trop longtemps, l'homme va leur échapper.

« Suivons-le ! » ordonne-t-il au garde qui l'accompagne. Pas le temps de discuter du pourquoi du comment ni du danger que représente cette décision.

La silhouette traverse déjà les jardins en courant à moitié courbé. Paul et son garde essaient de la suivre de la même manière en espérant qu'elle n'aura pas l'idée de se retourner... Sinon ils devraient certainement s'engager dans une course poursuite nocturne !

Tout ça, c'est de la faute de Rudy.


Partie 2 :
Escalade et cache-cache dans les jardins princiers et dans la ville.


Sa descente est périlleuse, son souffle est court, son cœur en vrille, sa tête sur le point d'exploser. Tandis que le cuir de ses gants glisse sur la solide corde, elle en vient à marmonner dans sa tête à l'encontre de son Oncle Alessandro :
*Vous ne pouvez rien faire comme tout le monde !**Voyez à quoi je suis réduite pour pouvoir passer un moment en votre compagnie!*


Chlick Chlick ! Font ses gants à chaque petite avancée la rapprochant de la terre ferme. Un faux mouvement, la corde qui lâche et adieu Victoria Falcone !

Je ne vais pas mourir pas plus que me rompre les os ! J'ai encore tant à voir et à faire ! Murmure-t-elle pour se donner du courage. Son parcours progresse mais il lui semble qu'il dure des heures interminables, elle n'est pas habituée à ce genre d'exercice quand bien même elle est plutôt frondeuse et aventurière lorsque ses petits petons sont posés sur terre. Il faut dire qu'avec un oncle comme Sandro, il serait honteux qu'elle ne soit pas débrouillarde. Elle sait que si le cas inverse se produisait, il braverait tous les dangers pour venir la retrouver. Alors avec toute la gaillardise possible, elle descend, elle descend et descend encore, vers les jardins du palais !

Chliiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiick Chliiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiick ! Cette fois la descente est rapide, sèche et vertigineuse. Elle n'a pas le temps de comprendre le pourquoi du comment, qu'elle se retrouve fesses à terre ! Jamais elle n'a autant aimé cette douleur à son joli postérieur ! La bonne terre ferme, l'herbe humide et tout le tralala terrestre lui font réaliser qu'enfin elle est au sol et entière. Elle ne doit pas traîner et se lamenter sur cette douleur qui la submerge toute entière, Le choc a été rude, elle en est sonnée.

Rapidement, elle se relève non sans geindre doucement du feu qui monte jusqu'au haut de son dos. Elle espère que ses os ne se sont pas brisés et regarde la corde toujours entre ses mains. Que doit-elle en faire ? Il faudra bien qu'elle remonte jusqu'à sa chambre ? Elle n'a donc pas d'autre solution que de la laisser en prenant soin de cacher ce qui traîne au sol et en priant que personne ne l'apercevoir d'ici son retour.

Victoria se fait toute petite, petite, rase les arbres, tourne la tête à droite, à gauche, afin de s'assurer que personne ne puisse la voir - Si elle savait ! - Elle progresse lentement car elle est bien loin de connaître toutes les allées de ces jardins là ! De temps à autre, elle s'assure que son chapeau soit toujours bien encastré sur l'épaisseur de sa chevelure et avance vaillamment à petits pas. Elle commence à s'habituer à la noirceur de cette nuit sans fin et prend un peu plus d'assurance. Tant et si bien qu'elle se heurte violemment contre un arbre en pensant avoir percuté un garde royal ou un promeneur nocturne. Sans réfléchir, la voilà à s'excuser à voix haute sans songer à la masquer.


Oh ! Pardonnez-moi, Monsieur !

Réalisant qu'elle demande pardon à un arbre, elle hausse les épaules à sa propre bêtise et continue sa progression en espérant n'avoir pas été entendue car ce serait la fin de son périple. 
Enfin, elle trouve une petite issue lui permettant de quitter les jardins sans passer par les hautes grilles du Palais. Elle se félicite d'être fine et souple comme une liane car sinon elle n'aurait plus qu'à repartir en sens inverse.

Évidemment, il n'y a pas d'éclairage dans la rue qui se dessine timidement sous ses yeux quelque peu perdus, cela complique son repérage pour se rendre à l'auberge du Palais. Victoria ne va pas abandonner maintenant ! Elle serre contre son corps endolori, l'épais tissu du manteau volé le temps de sa folle nuit afin de trouver un peu de la chaleur qui lui fait défaut et comme la brave petite guerrière qu'elle est, déterminée, elle s'avance vers le cœur de cette ville inconnue ...



(A suivre ...)


Partie 3 :
A l'Auberge du Palais




Pauvre petite Victoria ! Ces rues se ressemblent toutes : une crasse indescriptible, une puanteur qui lui donne la nausée pire qu'à bord du navire avec son Régent adoré. C'est dire.

Elle s'est d'abord terriblement éloignée du Palais princier avant que de se retrouver dans ce coin malfamé et d'avoir le trouillomètre à zéro. La petite guerrière n'en mène pas large et tremble sur ses jolies guiboles. Que diable vient-elle faire dans cette galère !  La revoilà à marmonner dans la barbe qu'elle n'a pas -z'avez eu peur hein ?!-

Maudit ! Je te maudis pour au moins les quinze générations de Falcone à venir de me donner rendez-vous dans un coin aussi ..... -Afin de ménager les cœurs sensibles, nous n'écrirons pas les mots d'injure prononcés par Victoria, sensée être une jeune fille bien née et bien élevée-


Elle s'est perdue un nombre incalculable de fois, a fait des tours, des détours, des tours pour rien et de fil en aiguille a terminé sa course devant cet étrange établissement dont la faible lumière éclaire à peine son enseigne "Auberge du Palais" Enfin ! Elle prie pour que son Oncle fasse les cent pas devant ce taudis en l'attendant. Aussi, s'approche-t-elle à distance respectable de chaque individu qui traîne là afin d’authentifier le visage connu. Mais rien ! Sandro n'est pas là ! Le coquin ! Il aura préféré se tenir au chaud pour la recevoir. Elle n'a pas d'autre solution que de pousser la porte de l'auberge et de s'avancer d'un pas pas franchement assuré. Il ne faut surtout pas qu'elle montre combien elle a peur d'être là où elle est. Ses grands yeux azur font un tour de salle mais pas d'Oncle Sandro non plus ! L'aurait-il oubliée ? Elle essaie de se souvenir du contenu de sa dernière lettre et reste plantée là, au beau milieu de la salle pendant un paquet de secondes.  Puis, elle se souvient ! Elle se dirige donc vers le comptoir, s'en approche mais pas trop, tente de se tenir fière et droite, en brave petit soldat qui va devoir jouer un rôle pas franchement assez répété dans sa grande chambre du Palais. Le visage qui s'offre à elle est H O R R I F I A N T !
L'homme a des yeux qui ressemblent à des yeux de crapaud ! Une horreur !
*Mio Paolino : Au secours !* Oui mais non. Son cher Paul doit se la couler douce au fond de son grand lit aux draps de qualité ! La jeune fille avale sa salive sans pouvoir prononcer un mot tant elle est effrayée par ce visage pas très Pascalien. Et ce qui devait arriver, arriva : elle se lance avec sa jolie voix de jeune fille avant de bien vite se reprendre avec celle maquillée en garçon.


Bonsoir.... - Raclement de gorge de Victoria - Hum Hum -

B'soir l'ami !
Tant qu'à faire, il vaut mieux essayer de parler comme doivent parler ceux qui fréquentent ce bouge.
J'cherche Messire de Montrieux !
S'rait'y arrivé ?


Si Sandro n'arrive pas dans les deux secondes, elle risque de se décomposer, de se liquéfier, de ... tomber dans les pommes, elle qui a horreur de ces démonstrations de bonnes femmes qui s'évanouissent pour un oui ou pour un non !

Elle ne sait hélas pas que Sandro est à l'étage et qu'il va lui falloir être plus que convaincante pour obtenir son sésame ...



Paul Chesnay-Taillandier a écrit:
« Oh ! Pardonnez-moi, Monsieur ! »

L'homme qu'ils suivent de près vient de heurter un arbre et de s'excuser auprès de lui.

Mais est-il sûr que c'est un homme ? Il ne peut être affirmatif mais de là où ils se trouvent, Paul a cru entendre une voix plutôt fluette. Pour ne pas dire féminine.

Une pensée fugace revient. Une image. Celle des mains de Victoria au dessus des siennes.

Pourquoi ? Il ne le sait pas lui-même. Et il n'a pas le temps d'y réfléchir puisque la chasse reprend. Ils sortent de l'enceinte sécurisée du palais tant bien que mal et s'enfoncent dans les rues obscures de Saint-Pierre-Port.

La nuit tous les chats sont gris.

Mais les régents ? Il prend des risques inconsidérés et regrette immédiatement de s'être embarqué dans cette filature. Mais maintenant qu'ils sont sortis, ce serait un non-sens que d'abandonner.

L'homme devant eux hésite souvent sur la direction à prendre. Ou peut-être a-t-il remarqué qu'il était suivi et essaie de les semer ?

Paul profite d'un de ses moments d'hésitation pour échanger à la va-vite à deux mendiants leurs lourds manteaux à capuche à l'odeur insupportable contre une de ses chevalières.

Il en enfile un et cache ainsi son visage. L'odeur provoque un haut le coeur qu'il retient avec dégoût.

Il tend le second manteau au militaire qui l'accompagne en lui ordonnant de le mettre et de cacher sa tenue de militaire français et ses armes.

Pas le temps de discuter. Un ordre ne se discute pas d'ailleurs. Les voilà repartis en filature.

Ils tournent en rond jusqu'à ce que l'homme s'arrête devant une auberge miteuse.



[ Auberge du Palais ]

L'homme hésite. Il n'a pas l'air d'être un habitué.

Un homme svelte. A la voix fluette. Qui se perd dans la ville. Qui va dans une auberge miteuse qu'il ne connaît pas. Tant d'informations qui laissent Paul hésitant.

Puis l'homme entre finalement dans cette auberge.

Paul se retourne vers le soldat qui l'accompagne.

« Que fait-on ? »

Le suivre ? Ne serait-ce pas trop dangereux ? Il a une capuche mais il reste le régent du Royaume de France et de Navarre. Si jamais son identité est découverte dans un tel lieu, ils n'ont presque aucune chance de s'en sortir vivants.

Rebrousser chemin ? A quoi bon être venus jusqu'ici alors ? Pour demander à la Régente de la Principauté de Guernesey d'y envoyer la milice demain à l'aube ? C'est une idée... Mais peut-être n'y retrouveront-ils pas l'homme.

Attendre ? Attendre que l'homme ressorte est peut-être la meilleure des solutions.

Celui qui a des yeux de crapaud la regarde d'un air pas franchement engageant. Même s'il lui adresse un sourire, les dents aussi jaunes qu'un bouquet de jonquilles, l'effraient encore plus. Le pire est que dès qu'il ouvre la bouche, un relent pestilentiel vient fouetter son petit nez sensible. De nouveau, la nausée lui vient, elle est à deux doigts de lui servir sur son comptoir : les mets raffinés dégustés au Palais. BEURKKK ! BEURKKK !
Comme elle aimerait pouvoir s'enfuir en courant, en volant même, afin de regagner le deuxième étage du Palais et se blottir dans son lit, au chaud. Pourtant Victoria ne se démonte pas, bien que son joli minois affiche un profond dégoût. Elle offre même un timide sourire à son interlocuteur.

Oui, Messire de Montrieux.

Il ne va pas lui faire répéter chacune de ses phrases tout de même ! Cet énergumène là ne respire pas la franchise, aussi lorsqu'il lui propose de l'accompagner, elle se méfie. Du reste, Victoria est en mode méfiance depuis qu'elle a posé les pieds sur l'herbe du jardin du Palais. Mais là : c'est la pomponnette !

Je peux très bien y monter ....

Pas le temps de finir sa phrase que le crapaud se dirige vers l'escalier. Elle n'a d'autre choix que de le suivre en se tenant à bonne distance. S'il pue autant de la bouche, elle imagine le pire quant à son postérieur ! Tandis qu'elle grimpe quelques marches, elle réajuste son chapeau et son manteau des fois qu'elle croise d'autres individus aussi affreux que celui qu'elle suit.
Lorsque le crapaud toque à la porte, la jeune fille reste elle, sur l'avant dernière marche, en retrait. Elle préfère s'assurer que celui qui ouvre la porte est bien son Oncle Sandro. Dans le cas contraire, elle n'aura plus qu'à dévaler les marches et à prendre la poudre d'escampette manu militari. Pourquoi parle-t-il d'une princesse ? Là voilà à paniquer : son accoutrement ne serait donc pas crédible ? Victoria retient son souffle et s'enfonce davantage tout contre le mur de cet escalier lugubre. La peur lui tiraille le ventre ... 


Paul Chesnay-Taillandier a écrit:Le régent tergiverse. Ca fait dix minutes qu'ils sont là et rien ne se passe. Ne devrait-il pas laisser tomber et rentrer au palais ? A quoi rime son comportement exactement ? Qu'est-ce qu'il lui a pris ?

Paul en était à se dire qu'il est idiot de se lancer ainsi dans l'inconnu quand un coup de feu retentit.



« AUUUUUUU SEEEEEEECOOOOOUUURS, NOUS MOURROOoons ! »


Un flot de personnes toutes aussi suspectes les unes que les autres fuient l'auberge.

Il n'a pas vu l'homme qu'ils suivaient. Est-il toujours à l'intérieur ? Est-ce lui qui a tiré ? Sur qui ? Quelqu'un est peut-être en danger de mort à cette heure-ci. N'a-t-on pas crié "NOUS MOURROOoons" ? Que faire ?

Si l'homme est seul, il sera facilement maîtrisé. Il est beaucoup plus fluet que Paul et son garde.

Un nouvel homme est sorti de l'auberge, ligoté et entouré de trois hommes. Ils s'éloignent vers le port.

« Sortez votre épée. Allons voir ce qu'il se passe là dedans ! »

A pas de loup, ils se dirigent vers l'auberge silencieuse. Philippe ouvre la marche. Paul le suit de près.

Il n'y a plus un chat au rez-de-chaussée. Mais des bruits sourds viennent du premier. Des gens bougent là-haut. Il n'y a pas de cris ni de pleurs. Mais plus d'une personne. Que faire ? Demi-tour à nouveau ?

Paul Chesnay-Taillandier a écrit:Tout ça c'est la faute de Rudy !

Ils hésitent et avancent à pas de loup.

La chose n'est pas aisée. Le vieux bois grince. Pourrait-on affirmer que c'est du fait que quelqu'un marche dessus ou que ce sont des craquements naturels ? Chacun aurait une réponse différente. Personne ne saurait le dire avec certitude.

Ils approchent des escaliers quand le grincement de la porte se fait entendre.

Paul attrape Philippe par la veste et le tire en arrière dans un coin plus sombre de la pièce déjà pas très bien éclairée. Ils ne sont pas au Louvre ici !

Un homme passe à moins de deux mètres d'eux et monte les escaliers.

Le deuxième part dans l'arrière-cour.

Le troisième transporte un homme comme un sac à patates et le balance derrière le comptoir où il le retient prisonnier.

Que faire ? Rester ici c'est s'exposer tôt ou tard.

Bouger ? C'est prendre le risque de s'exposer maintenant.

Les escaliers ne sont qu'à quelques mètres d'eux et pour l'instant aucun homme ne les voient. S'ils sont assez discrets, ils ont une chance de les atteindre et de monter.

Mais pour trouver quoi là-haut ?

Non. Il est plus prudent de rebrousser chemin. Il faut qu'ils ressortent de cette auberge. Il faut qu'ils rentrent au Palais.

Il n'aurait jamais dû s'embarquer la-dedans. Dès le début. Pour un illustre inconnu. Probablement un voyou.

Paul est énervé contre lui-même d'avoir ainsi mis en danger sa vie et celle de son garde.

Il lui tapote sur l'épaule et lui fait un signe vers la sortie pour qu'ils s'y dirigent le plus discrètement possible.

Et pendant ce temps-la au Louvre, Rudy dort tranquillement aux pieds du lit de son maître.


Paul Chesnay-Taillandier a écrit:
~ POUM, POUM, POUM ~

Des pas résonnent sur le parquet de l'auberge.

Quelqu'un se dirige vers la porte pour en sortir.

Paul et Philippe viennent juste d'en sortir. Ils vont se faire prendre !

En panique, Paul attrape son garde et se jette avec lui sous la mangeoire prévue pour les chevaux.

La cachette n'est pas des meilleures mais ce coin de rue n'est pas éclairé. La lumière de la fenêtre qui se trouve juste au dessus est stoppée par la mangeoire pleine de foin.

Le sol est mouillé et souillé par de nombreux crottins de chevaux.

C'est le prix à payer pour que l'homme reparte sans les voir.



~BOU-BOU-BOUM, BOU-BOU-BOUM, BOU-BOU-BOUM ~


Paul sent son coeur battre la chamade. Il se déteste pour la galère dans laquelle il s'est fourré. Plus jamais. Plus jamais il ne sera aussi profondément inconscient.

Il attend une minute ou deux le temps que son coeur retrouve un rythme plus habituel.

Mais c'est peine perdue.

De là où ils sont, ils entendent tout ce qui se passe dans la salle principale de l'auberge.

Et ce qu'il entend le fait presque bondir. Son coeur s'affole à nouveau. Il ne veut pas le croire. C'est la voix de Victoria !

On n'oublie pas la voix de la personne avec laquelle on a conversé deux jours durant en quasi tête à tête. Il mettrait sa main à couper que c'est elle !

Et ce qu'il entend ne fait que confirmer ce qu'il sait déjà.



« Sinon je crois bien que le Régent va m'envoyer croupir dans une geôle. »


Paul ferait-il cela ?

Il est assis dans le crottin et probablement la pisse et vêtu d'un long manteau qu'il a acheté à un clochard et qui empeste. S'il devait prendre une décision sur l'instant le couperet tomberait : deux nuits aux cachots !

Il a envie de se lever et de lui faire savoir qu'il est là. De la voir s'excuser comme elle ne s'est probablement jamais excusé de sa vie. De lui faire éprouver les pires remords qui soient.

Oui. Il lui en veut terriblement. Probablement autant qu'il s'en veut d'avoir été aussi stupide et de s'être embarqué dans une poursuite aussi dangereuse qu'insensée.

Mais Paul n'acceptera pas non plus d'être vu ainsi. Alors il ne fait rien pour se signaler. Il écoute juste. Parce qu'il veut quand même s'assurer qu'elle n'est pas en danger. Il y a eu un coup de feu tout à l'heure...

Il comprend alors que l'homme à qui elle parle est son oncle. Pourquoi alors avoir fait tout ça ? Pourquoi ne pas l'avoir rencontré en plein jour sans s'enfuir de sa chambre comme une voleuse ?

Un dernier verre et elle rentrerait... Et Paul rentrerait aussi. Et... Mais qu'est-ce que c'est que ce guignol qui vient de débarquer ?

Sandro la rassure comme il peut et avec coeur. Dans les yeux de son Oncle, Victoria est celle qui a bravé tous les dangers pour venir le retrouver. Comment aurait-elle pu faire autrement que de se soustraire à la vigilance des gardes, à la confiance de Paul pour venir retrouver cet Oncle Pirate qui ne doit pas avoir bonne presse auprès des grandes autorités ? Aurait-elle dû le mettre en danger en indiquant le lieu où il se cache pour vivre cette curieuse vie de vols sur les mers et autres forfaitures pas très réglementaires  ? Jamais de la vie. Voilà pourquoi, elle est fière d'avoir risqué de se rompre les os en s'extirpant de son deuxième niveau du Palais princier non pas par la porte mais par la fenêtre.
Sa position n'est pas facile : elle s'en veut de mentir à Paul mais elle ne peut décemment pas lui avouer la façon de vivre de cet incroyable Oncle.

Sans doute vaut-il mieux que le Régent ne me sache pas partie mon Oncle. Pour vous comme pour moi.

Doucement, elle soupire. S'il y a bien un être sur cette terre qu'elle ne veut jamais trahir, c'est bien Paul. Elle l'aime bien trop pour cela. Indépendamment de sa fonction, en tant que jeune femme éprise il lui parait inconcevable d'avoir à lui mentir. Ce mensonge est celui qui protège l'un et qui détourne l'autre par le silence de ce qu'il n'est pas bon qu'il sache.

Toute à ses pensées, elle réussit tout de même à faire honneur à la tarte aux poires dont la dernière bouchée la voit quasiment s'étouffer à la révélation de celle qui est aimée par Sandro.


Angelynn ? ARFchhhhpffff ! Elle devient aussi rouge qu'un champ de coquelicots sous l'effet de surprise et de ce morceau de tarte coincé dans sa gorge.

Oh çà alors ! Quelle coquinette qu'Angie ! Notez, j'ai bien vu que vous ne lui étiez pas indifférente lors de notre voyage d'Italie vers la France.
Nous sentons ces choses là, nous les femmes.


Et victoria, du haut de ses dix-huit printemps, de s’enorgueillir d'être une femme à la grande expérience par un large sourire en hochant fièrement la tête.

Je vous souhaite tout le bonheur du monde à tous deux.
Transmettez à Angelynn toute ma tendre amitié. Elle sait combien je l'apprécie.


Prête à terminer sa part de tarte et à trinquer avec son Oncle en levant son verre,

A l'am.....

un curieux bonhomme s'approche alors sans qu'elle ne s'en soit rendue compte. D'où sort-il ? Sa fourchette en tombe au sol, son verre plein se déverse intégralement sur la tenue rose du curieux personnage se tenant tout près d'elle à présent. C'est que l'effet de surprise est énormissime et qu'elle en perd tous ses moyens !

Ohhhh ! Oups .... La catastrophe est grande et s'étale amplement sur le tissu, la tenue rose du damoiseau/selle vire au violet !

La bouche de Victoria forme un O sans plus pouvoir prononcer un seul mot. Quel est cet étrange personnage ? Vêtu aux couleurs normalement dédiées aux femmes, l'air extrêmement efféminé, le voilà qui s'incline devant elle . Victoria regarde son Oncle puis regarde l'étrange créature ne réalisant pas que sa propre tenue doit laisser penser que ... Mieux vaut que la jeune fille ne réalise pas. Du moins pas tout de suite. En revanche, son réflexe de se faire passer pour un homme revient afin de continuer d'afficher sa couverture et sa voix reprend celle d'un jeune homme, enfin du moins l'espère-t-elle.

Bonjour Mondame heu pardon ... Monsieur

Vite se cacher ! Disparaître dans un trou de souris ! Victoria a vu une dame habillée en homme, ou un homme habillé en dame et elle a fait instinctivement la contraction du Monsieur-Madame en Mondame !


Paul Chesnay-Taillandier a écrit:
« Nous allons nous mettre en route pour le palais... »


Des choses se trament.

Les chaises grincent sur le plancher. Des pas se font entendre de partout. Impossible de savoir qui fait quoi.

Des ordres vont être donnés. Peut-être le sont-ils déjà.

Une seule chose est sûre : ils vont se mettre en route pour le palais princier.

Victoria les laisserait-elle s'attaquer aux gens vivant dans le palais ?

Paul en doute. Imaginer une telle trahison lui fait étrangement bien plus mal qu'il ne l'aurait soupçonné. Aurait-il baissé la garde sans s'en rendre compte ?

Mais ce n'est pas le moment de sonder cœur et âme. Ils doivent quitter le crottin et la pisse de cheval. L'obscurité les protège des regards au dessus et sur les côtés. Mais si le cortège passe devant eux, et il le fera car c'est ce chemin qui mène au Palais, alors ils se feront prendre.

« Venez ! Nous devons retourner au plus vite au Palais pour prévenir la garde ! » ordonne Paul à son garde en se tournant vers la rue.

Il relève la capuche de son hideuse cape sur sa tête pour se faire le plus discret puis essaie de sortir le plus discrètement possible.




Victoria
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Message par Victoria Mer 11 Jan - 11:43

"Per te"

18ème anniversaire de Victoria

Juillet 1655

P. Chesnay-Taillandier a écrit:On pourrait croire à une arrestation.

Deux gardes arrivent et abordent la jeune femme en train de travailler ses vignes.

« Mademoiselle Falcone ? Veuillez nous suivre s'il vous plait. »

Mais ce n'est pas une arrestation. On ne lui passe pas les fers ! Et Intrepido a le droit de venir.

On l'invite à prendre place dans une voiture...
On l'invite à prendre place dans une voiture aux armoiries du Régent...
On l'invite à prendre place dans une voiture aux armoiries du Régent vide !

Paul n'est pas là. Il a donné l'ordre d'aller chercher Victoria, quoi qu'elle puisse dire ou faire.

Lui, il l'attend ailleurs...

Où ?

A quelques kilomètres de Bourges court une rivière. Le Char [qu'on appelle désormais le Cher !].

A l'ombre d'un grand arbre, il laisse ses pensées s'écouler au fil de l'eau.

Tout est si calme ici, si apaisant.

Et cette eau, vive, limpide, apaisante et ressourçante, tentatrice même ! S'il avait dû nommer cette rivière il l'aurait appelé Victoria.

Et pourtant Paul n'est pas aussi calme qu'il pourrait l'être en d'autres circonstances. De temps en temps il jette un coup d'oeil à la route.

Combien de temps cela va-t-il encore prendre pour qu'ils soient enfin tous les deux sans rien ni personne autour, à part évidemment ses gardes... ?

Depuis qu'ils ont quitté Paris ils n'ont pas eu plus de dix minutes à eux. Rien que d'y penser il en devient désagréable.

Cette journée, c'est leur journée. C'est SA journée, à elle. Celle dont on fête la naissance aujourd'hui !

Et quelle fête ! Il a prévu du pain. Et des canards. Il sait qu'elle aime nourrir les canards. Il se souvient encore de ce moment terrible où elle a voulu lui faire donner à manger aux canards... Si Paul lance quelque chose, Rudy va le chercher.

La scène fut terrible ! Et terriblement drôle. Mais aujourd'hui il évitera de lancer du pain.

Il se souvient aussi que peu de temps avant cette catastrophe, elle lui avait sauté au cou pour l'embrasser.

Le refera-t-elle aujourd'hui ? Il l'espère sans vouloir se l'avouer. On ne lui a pas appris à avoir des sentiments pour une femme. Ce n'était pas dans le manuel du Parfait Vice-Prince.

Enfin ! La voiture approche ! Les gardes savent : elle a le droit, comme personne d'autre, de l'approcher.

Debout, au pied de son arbre, il l'attend comme s'il l'attendait depuis le jour où elle est née.



Comme toujours, c'est Intrepido qui aboie comme un beau diable qui voit la jeune fille se redresser afin d'aviser qui se tient là sur ses terres. Elle a à peine le temps de réagir que les gardes lui intiment l'ordre de les suivre. Sur l'instant, la jeune fille prend peur. Aurait-elle commis un bêtise, une erreur en cultivant ses terres avec acharnement ? Depuis son arrivée dans le Berry et  puisqu'elle ne peut passer que peu de temps auprès de Paul, elle travaille comme une forcenée sur ses pieds de vigne qui commencent à avoir fière allure. Septembre et les vendanges seront bientôt là, elle ne doit pas rater cette récolte. Elle ne peut se le permettre si elle veut pouvoir nourrir et subvenir aux besoins de ses gens entraînés eux aussi dans cet exode.
Ce qui inquiète terriblement la jeune fille, c'est ce teint halé qu'elle commence à avoir à force de rester au soleil des heures durant. Habituée de la Cour Vénitienne où le teint de porcelaine est de rigueur tout comme à la Cour de France, elle n'a plus rien de ce qui caractérise les canons de beauté des jeunes filles bien nées. Ses mains si fines, si douces deviennent légèrement rêches quand bien même s'évertue t-elle chaque soir, dans le cabanon au fond de ses terres, à s'enduire d'un baume acheté à Bourges chez un apothicaire qui lui a vanté ses mérites. Parfois, elle se demande si elle ne ferait pas mieux de retourner vivre à Venise auprès de son Père. Mais ses doutes ne durent que le temps d'un instant. A présent il y a Paul. Vivre sans lui ou même loin de lui relève de l'impossible pour la jeune fille. Et comme Victoria ne veut rien demander à Paul, ne veut bénéficier d'aucun avantage, elle se jette à corps perdu dans le travail qu'elle découvre chaque jour que le Très Haut accorde à ce monde. Du monde du travail et de celui de la terre en particulier, elle ne connaît rien. Aussi, tâtonne t-elle parfois mais jamais ne baisse t-elle les bras. D'ici Septembre, si sa récolte est bonne elle se lancera dans la production de vins fins. Sancerre n'est pas loin, elle en a conscience et la concurrence sera rude mais Victoria est une battante. Et puis, elle doit prouver à Paul qu'elle est une vraie petite guerrière prête à se battre pour lui, pour elle, pour eux deux.

Lentement, elle se dirige vers le carrosse et son cœur de met à battre plus vite dès qu'elle reconnaît les armoiries du Prince. Paul est là ! Son instinct premier est de s'élancer vers la voiture mais elle voit Intrepido revenir vers elle en jappant. Visiblement, Rudy l'inséparable de son tendre amour n'est pas là et son chiot en est mécontent voire triste.

Oh, ton compagnon de jeux n'est point là semble t-il ?
Viens Intrepido nous en saurons plus tout à l'heure.


La jeune fille aidée par un garde grimpe dans le carrosse avec son chiot qui recommence à aboyer. Elle constate l'absence de Paul et soupire doucement, déçue de ne pouvoir être serrée dans ses bras mais curieuse de découvrir la suite de cette mystérieuse équipée. Durant le trajet qui la mène elle ne sait où, elle tente de se redonner belle apparence. Que faire avec si peu ? Elle n'a pas eu le temps de se changer, de se vêtir d'une belle toilette, pas plus que de s'enduire les mains et le visage de ce baume réparateur. Elle sait être une fort jolie demoiselle mais à présent, là dans cette voiture qui roule : elle doute, elle craint de se présenter à Paul en si piteux état. Son visage poupin respire pourtant la santé et Victoria rayonne sans le savoir.


Le carrosse stoppe sa course et déjà Intrepido est dehors à saluer Rudy qui lui fait la fête. La jeune fille sourit de les voir faire et sait à présent avec certitude que Paul n'est pas loin.
Avec grâce, elle s'extrait du carrosse et balaie ses grands yeux couleur océan sur le paysage environnant. Elle découvre avec un plaisir non dissimulé une vaste étendue d'eau et quelques canards qui y barbotent mais ce n'est pas cette vision bucolique qui l'intéresse. Avec avidité, impatience, elle cherche Paul. Tout l'appelle à elle. Absolument tout. Victoria effectue quelques pas puis, enfin, elle le voit. Grand, beau, puissant et altier. Il est en appui contre le tronc d'un arbre et la cherche aussi du regard. Cet instant où enfin leurs regards se croisent est magique. Avec délicatesse, elle soulève les pans de sa robe et s'élance en courant vers lui avec toute la fraîcheur et la spontanéité de ses dix neuf printemps.

Par précaution et en se remémorant sa dernière rencontre avec le Prince, elle se tourne tout en courant afin de veiller à n'être pas encore suspendue dans les airs par les gardes du corps du Régent de France. OUF ! Ils se tiennent à bonne distance et semblent accepter qu'elle se rapproche de plus en plus. Là voilà à présent tout près de son tendre amour. La jeune fille se hisse sur la pointe des pieds, pose délicatement sa main sur celle de Paul et le couvre de doux baisers. Elle ne peut plus s’arrêter et lui offre ainsi tout l'amour qui est le sien. Entre deux baisers qui viennent caresser tout le visage princier, elle lui murmure :

Si vous saviez combien vous m'avez manqué.

Sa fine menotte se lie à celle puissante et rassurante du Prince. Rien ne peut plus lui arriver de mal. Paul est là, près d'elle.


P. Chesnay-Taillandier a écrit:Enfin !

Paul se croit revenu aux Tourterelles. A cette première fois où il l'a vu courir vers lui pour l'embrasser.

Ce n'est pas lui qui court et pourtant son coeur s'accélère.

Il se redresse et fait deux pas.

Ses bras accueillent enfin le corps de Victoria et il s'autorise une étreinte qui ne rentre absolument pas dans les règles de la bienséance.

Mais il s'en fiche car s'il ne le fait pas il a l'impression que son coeur explosera de mécontentement.

Elle sent le soleil, la vigne et... elle.

Paul ferme les yeux et sourit.

Il est enfin en paix.

« Enfin... »

Il n'aime pas quand elle est loin.

Ou quand elle n'est pas loin mais que leurs charges respectives les éloignent.

Mais ont-ils vraiment le choix ?

Il relâche son étreinte, abandonne la main de la jeune femme, pour prendre son doux visage entre ses mains et sonder son regard.

Elle a changé. Cet exode a tué une part de l'insouciance qui l'habitait jadis.

Mais elle s'est embellie. De force, de courage et de détermination.

Dans un souffle, presque un murmure, il laisse échapper à voix haute le résultat : « Vous êtes si belle. »

Puis il amène les lèvres de la jeune femme sur les siennes et l'embrasse avec amour.

Une de ses mains passe dans ses cheveux. L'autre redescend et effleure le cou, puis l'épaule, longe le bras et récupère la main qu'elle avait délaissée quelques instants plus tôt.

Lorsque leur baiser s'achève, Paul garde les yeux fermés quelques micro-secondes, un sourire sur les lèvres.

C'est bon. Il est en paix. La journée peut enfin commencer.

Il rouvre les yeux et entraîne alors Victoria devant le plan d'eau où il laissait ses pensées aller quelques instants plus tôt.

Il guette Victoria du coin de l'oeil, cherchant à savoir si l'endroit lui plaît.

« J'ai trouvé cet endroit non loin de Bourges en me rendant à un campement provisoire. C'est si calme et reposant... »

Il se penche vers un petit baluchon posé non loin et tend du pain à Victoria.

« Quand j'ai rencontré les habitants de cette rivière, j'ai immédiatement pensé qu'il vous plairait de faire leur connaissance », dit-il, les yeux rieurs, en présentant les canards à Victoria.

« J'ai ouï dire que c'est un jour spécial aujourd'hui... Que diriez-vous de le passer avec moi ? »

Il ne doute pas de la réponse de la jeune femme. Mais un Prince ne se comporte pas comme si tout lui était acquis.

Il faut savoir, en toutes circonstances et même s'il pourrait simplement ordonner les choses, rester galant et courtois.

La douce et délicieuse prison des bras de Paul l'enveloppe toute entière. C'est ainsi qu'elle voudrait pouvoir vivre à chaque seconde et c'est ainsi qu'elle voudrait s'endormir pour toujours lorsque le Très Haut l'aura décidé. Pour l'heure, Victoria n'est pas à penser à une vie qui pourrait s'éteindre mais bien à celle qui s'ouvre à elle, rayonnante et prometteuse. Paul et Victoria n'ont jamais échangé la moindre promesse mais tout est tellement limpide entre eux que cela en devient implicite. Elle succombe au délicieux baiser reçu et hésite encore à s'enhardir à le rendre au centuple. Il parait que cela n'est pas convenable pour une jeune fille bien née et éduquée dans le respect de toutes ces étiquettes qui l'ont abrutie plus jeune. Mais en France ? Ne dit-on pas qu'après l'Italie c'est le pays de l'amour ?
Un jour, lorsqu'ils se connaitront mieux qu'aujourd'hui, elle posera la question à Paul. Heureuse de retrouver la main masculine qui s'est un instant échappée de la sienne pour la couvrir de délicates caresses, elle sourit et plonge ses grands yeux dans ceux de son tendre Paolino. Elle hoche doucement la tête au "Enfin". Oui enfin ! Il faut que cet instant dur toujours.

Après que leurs corps se soient reconnus au long de cette douce étreinte les voilà qui s'éloignent l'un de l'autre mais pas trop. Juste ce qu'il faut. Victoria rougit timidement au compliment reçu mais elle s'en trouve rassurée, elle qui s'inquiétait de se présenter dans si simple toilette. S'il savait comme elle, elle le trouve beau et absolument craquant. Cela aussi, demain, elle le lui murmurera à l'oreille.

A sa demande, elle prend le temps d'admirer le paysage qui s'offre à la vue. Un plan d'eau et des canards comme aux Tourterelles ! Bien sûr, elle les a remarqués en arrivant mais ne s'est pas attardée, l’urgence étant de retrouver Paul. A présent qu'ils peuvent regarder en direction du même horizon elle sautille de joie autour de Paul et se saisit du pain sec offert.


C'est comme à Eu Paul !
C'est magnifique ! Quelle belle idée vous avez eue là.



Victoria lance son premier morceau de pain et inévitablement Rudy et Intrepido se jettent à l'eau pour tenter de happer le projectil farineux. Victoria éclate de rire en regardant Paul.

Je crois qu'en leur présence : les canards ne mangeront pas.

Terriblement amusée, elle renouvelle pourtant l'opération en jetant un quignon de pain dans le sens opposé des deux chiens qui s'ébrouent joyeusement dans l'eau. Étonnée de la question que lui pose Paul, elle s'arrête et le regarde en souriant.

Un jour spécial dites-vous ?
Ah ?


Avant de prendre le temps de réfléchir à cette affirmation,  elle s'empresse de rajouter.

Spéciale ou pas, je souhaite de tout mon cœur partager cette journée en votre compagnie.

Puis, elle comprend. C'est aujourd'hui le jour de sa naissance dix-neuf ans en arrière. Cet exode a tout chamboulé dans la vie de la jeune demoiselle, elle en a même oublié cette journée spéciale, en effet. Terriblement émue que Paul y ait pensé, elle se hisse sur la pointe des pieds et vient embrasser tendrement ces lèvres qu'elle aime tant.

Merci. Je ne pouvais rêver plus belle célébration qu'en votre douce présence.

Sa fine main caresse le visage aimé puis elle tire Paul avec énergie et douceur mêlées, vers le bord de la rivière. La journée est chaude, ensoleillée et le ciel si clément que tous ces éléments sont propices à un moment de partage inoubliable dont elle propose à Paul de le découvrir avec elle.

Et si nous aussi nous nous baignions ?

Avec agilité, elle se cache derrière Paul, ôte ses souliers, ses bas et réapparait devant lui en tenant les pans de sa robe à hauteur respectable. Sans hésiter, l'un de ses petits petons caresse l'eau et voilà la jeune fille à rire joyeusement.

Elle est un peu fraîche mais il fait si chaud que nous ne serons pas incommodés.
Venez Paul ! Essayez de plonger vos pieds dans cette eau pure.


Ici, loin de tout et de tous, pas un seul instant Victoria ne songe qu'elle s'adresse à un Prince, Régent de France et de Navarre. Elle ne voit que l'homme dont elle est terriblement amoureuse et qui se tient devant elle comme tel.
Avec douceur tandis que son autre pied se plonge dans l'eau, sa fine main se tend vers Paul, l'engageant à la rejoindre.


P. Chesnay-Taillandier a écrit:
« C’est comme à Eu Paul ! »


Et son coeur s'arrête de battre.

Il vient de se passer quelque chose mais son cerveau n'identifie pas tout de suite la source de ce choc.

« Paul ».

C'est ça.

Elle vient de l'appeler par son prénom.

Depuis combien de temps n'a-t-il pas été appelé par son prénom ?

Au moins depuis qu'il a quitté la Nouvelle-Angleterre. Seule sa famille proche l'appelle ainsi.

Leur relation prend alors un tout nouveau jour. Un jour qu'il n'avait pas encore perçu : Victoria est la seule personne de ce Royaume avec laquelle il a des liens affectifs forts.

Rien qu'à cette pensée, il voudrait la serrer dans ses bras et ne plus jamais la laisser s'en échapper.

Mais il est vite ramené à la réalité par la jeune femme qui s'amuse de leurs chiens.




« Je crois qu’en leur présence : les canards ne mangeront pas. »



Paul rit en voyant les deux zouaves s'ébrouer dans l'eau.

« Relativisons, ils n'essaient pas de les attraper non plus. C'est toujours mieux que rien. » dit-il en haussant les épaules, amusé.

Puis commence la valse des sentiments.

De ses mots tendres, Victoria ravive les dernières pensées de Paul.

D'un doux baiser, elle réveille ses envies.

D'un tour autour de lui pour ôter quelques apparats, elle menace de faire exploser son self-control.

Et d'une main tendue l'encourageant à la rejoindre, elle l'invite à la légèreté et à l'insouciance du moment.

Est-il possible de survivre longtemps à ce tourbillon ?

Il ne faut pas nager contre le courant. C'est leur journée. Il doit se laisser porter par l'instant présent.

Et l'instant présent lui dit de se débarrasser de ses chausses et de rejoindre la jeune femme, aussi folle soit l'idée.

« Si jamais je finis complètement trempé, vous pouvez dire adieu au privilège de pouvoir m'approcher sans que les mousquetaires ne se chargent de vous en empêcher, Victoria. » dit-il d'un ton plaisant, mais pas complètement dénué de sérieux.

Il est hors de question qu'il se retrouve "par mégarde" les fesses dans l'eau !

Il attrape alors la main de la jeune femme et avance dans l'eau.

Fraîche ?!

La jeune Italienne ne connaîtrait donc pas les termes "congelée", "glaciale", ou encore "surgelée".

Parce que c'est plutôt ces termes là qu'il aurait choisi lui !

Il masque à peine une grimace face à ce terrible constat.

Heureusement que Rudy et Intrepido sont là pour faire diversion...

Car si Paul pouvait menacer Victoria en cas d'arrosage intempestif, il n'en était rien pour leurs chiens qui, bien heureux de voir leurs maîtres dans l'eau avec eux, accourent dans un nuage d'éclaboussures pour bondir autour d'eux.

En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, les voilà tous deux constellés de gouttes d'eau jusqu'aux hanches.

Heureusement, la pudeur est sauve, ils ne sont pas -encore- assez mouillés pour que leurs vêtements décident d'épouser leurs peaux.

Paul grommelle.

« La prochaine fois, les chiens resteront au Palais ! »

Il se regarde à nouveau, regarde Victoria, puis éclate de rire face au ridicule de la situation.

Finalement, il s'est rapidement accoutumé à la température et doit bien reconnaître que la "fraîcheur" procurée est plutôt agréable.

Tenant la main de Victoria, il la pose sur son avant-bras pour l'inviter à une marche prudente à hauteur d'eau convenable.

« Je ne vous cache pas ne pas avoir prévu de grandes animations. Un simple repas, juste vous et moi. Une toile tirée sur la pelouse pour nous y reposer... »

Cela suffira-t-il ? Peut-être aurait-il dû prévoir quelque chose de plus mondain. Un bal surprise ? Il le fera à la prochaine occasion !

« Je pensais acquérir ces terres pour y construire un grand domaine. Vous pourriez y être à vos aises, vous et vos gens, et retrouver un peu de votre vie d'avant... Qu'en dites-vous ? »
Et ... la jeune fille ne marche pas sur l'eau comme Moïse mais ... sur des oeufs pour veiller à ne pas choir et Paul avec elle. Il serait ballot que ce privilège de pouvoir l'approcher de tout près lui soit ôté. Cependant, elle ne souhaite pas perdre complètement cette divine part d'inconscience, de spontanéité qui fait d'elle ce qu'elle est. Sa menotte est en appui sur le bras masculin, tandis qu'ils avancent pieds nus dans cette eau fraîche. Tout réside à présent, à ce qu'ils ne s'éloignent pas du bord de la rivière, au risque, sinon, d'être totalement trempés.

Les éclats de rire se fondent quand les chiens se montrent par trop affectueux et que des milliers de gouttelettes rafraichissantes à souhait viennent épouser leurs vêtements. Paul se montre joyeux lui aussi tout en invectivant les deux fripons qui seront punis de promenade au bord de l'eau la fois prochaine. Cela amuse terriblement Victoria qui regarde Paul.


Les pauvres ! Ils vont être si tristes d'être privés d'eau et ... de canards !

Le soleil se reflète sur l'eau magiquement. Celle-ci prend des couleurs d'arc en ciel selon comment les deux jeunes gens avancent. Il y a fort longtemps que Victoria ne s'est pas sentie aussi bien. Tout est ici réuni  : celui qu'elle aime présent à ses côtés et Dame Nature qui déploie toutes ses merveilles pour que l'instant soit harmonieux et doux. Ont-ils besoin d'autre chose ? Jusqu'à ce que Paul lui indique la suite du programme de cette journée, Victoria ne se posait nullement la question, préférant savourer l'instant présent.

Un déjeuner sur l'herbe à l'ombre d'un arbre, vous, moi. Comment vouloir autre chose ?
Non, les animations, laissons-les pour le Palais. Rien ne peut être plus agréable que ce moment privilégié loin de tout et de tous.
Je suis la plus chanceuse de ce Royaume.


Elle le regarde avec tendresse et ajoute.

Et cela grâce à Vous.

Les chiens se sont éloignés mais continuent de cavaler en bordure de rivière. L'air est doux mais fort chaud. L'envie de se baigner titille la demoiselle qui préfère rester sage au risque d'être harponnée par les gardes du corps qui restent vigilants, elle n'en doute pas. Toujours en appui sur l’avant-bras masculin, elle glisse sa main dans celle de Paul emmêlant avec douceur ses doigts aux siens.

Vous voyez que l'on s'habitue à cette fraîcheur bienvenue par cette chaude journée ?
Souhaitez-vous que nous nous installions à l'ombre ?


Déjà, ils s’éloignent de la rive et profite d'une autre sensation subtile : celle de l'herbe qui vient lécher leurs pieds, leurs chevilles. Elle ne sait où se trouvent la toile à étendre sur l'herbe pour prendre place, et, à vrai dire, elle s'en moque, car toute à Paul qui décidera quand, comment et où il souhaite que soit dressée cette table naturelle. Émue par la dernière question posée, elle voudrait pouvoir se pendre à son cou, le couvrir de baisers, l'étreindre avec passion et lui répondre simplement : *Tant que je suis à vos côtés, je peux résider n'importe où.*

Elle ne doit pas oublier que Paul n'est pas n'importe qui, qu'elle ne peut se montrer exagérément démonstrative. Maudite bienséance ! Elle doit néanmoins lui faire comprendre ce qu'elle souhaite.


Dans ma vie d'avant, vous n'étiez pas encore là.
A présent, je ne peux imaginer vivre loin de vous. Voilà ma vie d'aujourd'hui.


Paul est fin, subtil, pour comprendre ce qu'aimerait vraiment Victoria. Et puis, sa réponse permettra au Prince de décider s'il souhaite lui aussi s'installer sur ce même domaine avec elle à ses côtés. Elle ne peut le décider pour lui.

Au hasard de leurs pas, Victoria se baisse pour cueillir quelques fleurs de campagne. Avec naturel, elle en glisse une sur son oreille, puis se hisse sur la pointe des pieds et place une fleur blanche sur l'oreille de Paul en lui volant un doux baiser. Très vite, sa main retourne à sa place : dans celle de Paul.


Oh ! Regardez ! Ce saule pleureur serait parfait pour abriter notre déjeuner des rayons du soleil !
On croirait qu'il n’attendait que nous.


P. Chesnay-Taillandier a écrit:Leur progression dans l'eau est pour Paul un vrai parcours du combattant, digne des sept travaux d'Hercule ou presque !

Il a d'abord peur que les chiens les fassent tomber ou les arrosent bien trop pour que l'honneur de Victoria soit sauf.

Il faudrait tuer tous les gardes qui verraient la robe de Victoria dessiner toutes ses courbes les plus intimes dans les moindres détails.

Rien qu'à cette pensée une pique se plante dans le coeur de Paul. Serait-ce donc de la jalousie ? De la possessivité ?

A ces premières angoisses s'ajoutent celle de se ridiculiser en finissant les fesses dans l'eau après avoir lamentablement glissé sur des pierres bien trop vaseuses, et par conséquent bien trop glissantes à son goût !

Alors il se concentre pour ne pas tomber, tout en surveillant les chiens du coin de l'oeil.

Et puis il y a Victoria.

Elle est sa principale source de déconcentration, et sa principale source d'inquiétudes ridicules ! Les deux à la fois.

Il a peur qu'elle finisse trempée.

Il a peur qu'elle glisse.

Il a peur de mal faire à force d'avoir peur des autres trucs.

Et du coup il a peur de devenir fou à force d'avoir peur de ses peurs.

Quand ils finissent par sortir de cet enfer, Paul relâche un léger soupir qu'il ne savait pas contenir.




« Dans ma vie d’avant, vous n’étiez pas encore là. A présent, je ne peux imaginer vivre loin de vous. Voilà ma vie d’aujourd’hui. »



Paul ne répond pas immédiatement.

Cette réponse implique tellement de choses.

Elle le renvoie à des questions qu'il s'est déjà posées.

Elles peuvent toutes se résumer en une seule : "comment faire pour bien faire ?".

Il est Vice-Prince de Nouvelle-Angleterre. Et désormais Régent du Royaume de France et de Navarre.

Tout ceci implique un nombre inimaginable de conventions.

A commencer par le choix de ses parents !

Paul n'a jamais réfléchi à la possibilité d'être uni à quelqu'un par amour. Les mariages arrangés sont la norme dans les familles au sang bleu.

Et si par hasard les époux s'éprennent l'un de l'autre, ce n'est que la surprise pour chacun d'eux.

Le mariage de ses propres parents n'est pas un mariage d'amour. Il s'est tissé entre eux un lien de confiance et de tendresse réciproques, mais de l'amour ?

Paul en doute.

Et on ne parle pas de ces choses triviales.

Pourtant il faudra bien qu'il en parle avec eux s'il doit leur faire part de ses projets de vie.

« Je ne serai jamais loin de vous, Victoria. Et vous saurez toujours me retrouver. Rien ne vous en empêchera. Car rien n'arrête l'audace et le courage. » dit-il en reprenant la devise de sa famille pour l'appliquer à la jeune femme.

Comprendra-t-elle les épreuves que cela implique ? Certainement.

Après tout, elle a reçu une éducation de haute noblesse en Italie. Et les mêmes questions pourraient se poser de son côté.

Mais en lui rappelant sa devise, en l'invitant à la faire sienne, il en dit également long sur ses intentions.

Toujours aussi spontanée. Victoria se penche et ramasse quelques fleurs des champs.

Et sous prétexte de lui en mettre une dans les cheveux - quelle horrible idée, aurait-il donc une tête de vase ? - elle lui vole un baiser.

Il sourit bêtement avant de récupérer la fleur dans ses cheveux et de la garder précieusement dans ses doigts.

Plus tard, il la fera sécher dans un livre pour la garder en souvenir de cette journée.




« Oh ! Regardez ! Ce saule pleureur serait parfait pour abriter notre déjeuner des rayons du soleil ! On croirait qu’il n’attendait que nous. »



L'enthousiasme de Victoria chasse toutes les tracasseries de Paul qui sourit désormais avec légèreté.

« Ne le faisons pas attendre plus longtemps alors ! » dit-il en accentuant faussement le ton pour faire mine de presser la cadence.

Il se tourne alors vers ses gardes et donne ses ordres pour que la toile soit installée au pied du saule choisi par Victoria.

Quelques instants plus tard, ils peuvent enfin prendre place.

On leur sert alors un vin blanc frais dans des verres amenés spécialement pour l'occasion.

C'est pique-nique, certes, mais pas le pique-nique de n'importe qui quand même !

Paul lève son verre pour trinquer.

« A vous, Victoria. Et à nous. » dit-il en plongeant son regard dans le sien.

Ils trinquent puis Paul porte le vin à ses lèvres pour se désaltérer un peu.

Petit à petit, on dépose divers mets devant eux pour leur permettre de picorer. Il y a du pain, de la charcuterie diverse, des fromages divers, quelques légumes crus...

Tout en grignotant Paul lance l'un des sujets qui lui plaira certainement le plus.

« Et si vous me parliez de vous, Victoria Falcone ? J'ai envie de tout savoir... »

Qui n'a pas envie de tout savoir sur la personne qu'il aime ?

Elle n'a pas encore eu le temps de répondre que les yeux de Paul se teintent de fascination pour la jeune femme et pour tout ce qu'elle pourrait accepter de lui raconter.

"Rien n'arrête l'audace et le courage." Cette maxime ne cesse de trotter dans la tête de la jeune Victoria. Bien que son regard ne quitte pas celui de son Prince, elle ne peut que tenter d'analyser encore et encore, dans tous les sens, ces quelques mots forts. Bien sûr, elle n'occulte pas ce que Paul lui a dit juste avant. Il sera toujours là pour elle. Elle en est aussi soulagée que troublée. Lui revient alors à l'esprit sa condition, ici en France. Que peut-elle réellement espérer ? Un Prince de sang peut-il envisager d'aimer une jeune fille d'une haute noblesse étrangère qui n'a pas de sang bleu dans les veines ? La réalité la rattrape, l'insouciance s'envole et son cœur souffre déjà d'une issue fatale. Jusqu'alors, jamais n'a été évoquée la perspective d'un avenir commun. Discrètement, elle déglutit et se sent pâlir légèrement. Victoria sait avec assurance que sa vie sans Paul ne pourra être. Sur l'instant, elle s'imagine prête à vivre dans son ombre, cachée aux yeux du reste du monde mais près de lui. Elle y serait prête pour pouvoir espérer encore quelques instants de bonheur volés de ci de là. Victoria ne sait rien de la vie à deux, pas même de l'intimité qu'un couple se doit d'avoir. Elle a dix neuf ans depuis ce matin et a toujours respecté cette pureté à conserver jusqu'au jour de ses épousailles, prônée inlassablement par son père, sa gouvernante, ses précepteurs. En Italie, plus qu'ailleurs sans doute, c'est une condition sacrée pour toutes jeunes filles bien nées. Pourtant, elle se sent prête aussi à renier ce bien le plus précieux à offrir à son futur époux, juste pour ne pas avoir à être tenue éloignée de Paul quand il devra s'unir avec celle qui aura été choisie par ses pairs. Elle y est prête, oui, mais elle sait que Paul ne saurait l'accepter et au fond : cela la rassure.
De l'audace ? Elle n'en manque pas et Paul le sait. Il lui a bien souvent demandé de modérer sa spontanéité, notamment lors des Conseils.
Du courage ? Pour Paul elle peut s'armer d'un courage sans fin.

Sa fine main vient se poser sur le tissu de sa robe à hauteur de sa poitrine. Sous le tissu, bien au chaud, tout contre sa peau douce et ferme, se cache toujours la cocotte en papier réalisée par Paul. Ce simple geste suffit à lui donner tout le courage nécessaire pour défendre avec ardeur l'amour qu'elle porte à son doux Prince. Elle plonge son regard dans celui de Paul et d'une voix douce mais déterminée, elle répond :


De courage et d'audace jamais je ne manquerais pour défendre ce qui compte réellement pour moi.

Cette promesse est confortée par un sourire franc et sincère adressé à Paul afin qu'il comprenne qu'elle est prête à se battre pour lui, pour eux. Puis, machinalement et afin de reprendre contenance face à tous ces doutes, ces interrogations, ces peurs : elle prend un légume cru dont elle croque une bouchée avec délicatesse.

Elle réalise en dégustant sa bouchée, que les pieds des deux jeunes gens sont encore nus après leur promenade dans l'eau. Son petit peton droit va se coller tout contre le pied princier et, rassurée par cette chaleur aimée et bienfaitrice, elle lève sa coupe à l'invitation de Paul qui pour la toute première fois prononce un "A nous" chargé de promesse. Elle en est émue et sa voix le révèle sans doute lorsqu'elle prononce les mêmes mots.

A nous.

Elle se lance alors dans le récit de ce qui a été sa courte vie. Il est vrai qu'ils ne savent rien l'un de l'autre pour tout ce qui concerne leur vie avant leur rencontre.

Je suis née à Venise. J'ai grandi auprès d'un père aimant, attentionné, bien que très pris par sa charge de Premier Conseiller du Doge de Venise. Auprès d'une Mère dont je ne peux pas dire si elle m'aimait tant elle n'en montrait rien mais qui a toujours veillé sur moi avec bienveillance. Ma petite enfance, mon adolescence, se sont déroulées au sein du Palais des Doges où Père y a ses appartements privés situés tout près de ceux du Doge. J'ai donc évolué selon mon rang de fille del Duca Arnoldo di Cagliostro au sein de la Cour vénitienne. Je suis fille unique et donc héritière du prédicat du Duché de Mestre.
Mestre est une magnifique ville qui est l'expansion de la Cité de Venise sur la terre ferme. Père en est donc le Duc et possède une belle propriété où nous retournions nous ressourcer chaque fois que possible, loin de l'agitation de la Cour.
A Mestre, l'on peut dire que je recouvrais un peu de souplesse et de liberté avec un peu moins de rigidité que celle voulue au Palais. Ce sont des moments heureux, insouciants et surtout des moments rares, partagés en compagnie de Père.


La jeune fille marque une légère pause, sourit à Paul et déguste une petite gorgée d'un vin blanc frais à souhait. Il est sans doute temps d'indiquer le pourquoi de l’intitulé Falcone à son patronyme d'origine.

J'ai toujours cru que ma mère était l'épouse de Père. Mère a participé elle aussi, activement, à mon éducation. De cette union, il n'y a pas eu d'enfants ce qui explique sans doute pourquoi Père a tenu secret aussi longtemps que possible les origines de ma naissance. Origines que je ne connais que depuis moins d'un an et qui m'ont conduite ici en France pour ... pour faire connaissance avec ma véritable mère : Mercedes Falcone.
Tout ce que l'on a bien voulu m'en dire, c'est que la Vicomtesse de Nivelle m'a enfantée et qu'on lui a déclaré que j'étais morte à la naissance afin de l'éloigner de moi, de Père, de Venise : à tout jamais. Elle ... la Vicomtesse n’appartenant pas au même rang que Père, l'union n'était pas possible, ni souhaitée. Voilà tout ce que je sais.



La jeune fille trempe de nouveau ses lèvres dans le verre de vin et réalise qu'elle est au cœur même de ce à quoi Paul et Victoria seront confrontés, peut-être, un jour ou l'autre. L'histoire se répéterait-elle chez les di Cagliostro ? Victoria n'est pas princesse de sang.

Je suis donc venue en France pour faire connaissance avec Madame ma mère Mercedes Falcone et l'on peut dire, d'une certaine façon, que c'est grâce à elle que j'ai pu vous rencontrer Paul. En cela, je lui en serais reconnaissante éternellement car je dois vous avouer ne pas trop connaître celle qui est ma Mère de sang. Je la respecte, cela va sans dire mais je ne suis pas proche comme il le faudrait sans doute. Peut-être que le temps le permettra ?

Victoria n'en sait rien de rien, elle évolue si différemment de sa mère qu'il y a un gouffre entre elles deux. De narrer ce début d'histoire a ébranlé la jeune fille qui ne réalise toujours pas cette nouvelle filiation familiale. Afin de dissiper au mieux le trouble qui s'installe en elle, elle cherche le moyen de changer de conversation, du moins pour un moment, car elle ne doit rien, absolument rien cacher à Paul qui pourrait un jour se retourner contre eux. Du reste, elle n'a pas d'autres secrets, celui révélé étant déjà largement suffisant pour la déstabiliser depuis cette année en France.

Sa voix reste douce bien que chargée en émotions et elle poursuit par une question, à son tour, son petit peton restant bien en appui tout contre celui de Paul. Cela la rassure, terriblement.


Et vous Paul ? Où avez-vous grandi ? Avez-vous eu une enfance heureuse ?


P. Chesnay-Taillandier a écrit:Paul touche à peine à la nourriture qu'il a devant lui.

Pourquoi ? Il y a pourtant tout ce qu'il aime, ou presque. Les légumes c'est plus pour faire plaisir à Victoria !

Alors pourquoi ?

Parce qu'il est fasciné.

Fasciné par ce petit pied qui est venu -presque discrètement- chercher le sien.

Fasciné par la jeune femme qui se tient devant lui aujourd'hui et qui lui ouvre son coeur.

Cela n'a pas du être facile. Cela ne doit pas être facile.

Est-elle bien intégrée ? A-t-elle des amis qui s'occupent de la faire rire quand il n'est pas là ?

Doit-elle faire face seule ?

Non. Elle ne sera pas seule. Car elle pourra le retrouver où qu'ils soient si quelque chose ne va pas.




« ... je dois vous avouer ne pas trop connaître celle qui est ma Mère de sang. Je la respecte, cela va sans dire mais je ne suis pas proche comme il le faudrait sans doute. Peut-être que le temps le permettra ? »



Paul lui sourit pour la rassurer.

« Je n'en doute pas. Et si vous voulez une astuce, je vous recommande la crêpe et le calva. Il suffit simplement d'y penser pour qu'elle arrive séance tenante ! » dit-il en se retournant vivement dans tous les sens pour faire comme s'il s'attendait vraiment à la voir surgir de nulle part.

Riant à sa petite plaisanterie, il espère remettre un peu de légèreté dans leurs échanges.

Un peu de légèreté et de joie dans la vie de Victoria. Car elle n'est jamais plus belle que quand elle rit.

Sauf peut-être quand elle réfléchit. C'est amusant de scruter ses expressions quand elle réfléchit.

Ou quand elle dort. Mais ça, Paul ne peut pas le savoir.

"Pas encore" complète la petite voix dans sa tête. Celle qui lui dit de croire à un fin heureuse.





« Et vous Paul ? Où avez-vous grandi ? Avez-vous eu une enfance heureuse ? »



Il y aurait tout un livre à écrire sur la vie de Paul. Nul doute d'ailleurs qu'il est déjà commencé !

Comment faire court mais complet ? "En Nouvelle-France. Oui" ?

Si seulement c'était si simple ! Mais avant... une boutade !

« Ainsi donc vous ne savez pas tout de moi ? Alors que mon histoire doit faire l'oeuvre de nombre d'écrivains ? » dit-il en s'offusquant faussement.

« Mon père s'est installé en Nouvelle-France lorsque ces Terres ont été découvertes. Il en est le Vice-Roi. Je suis né là-bas, en Nouvelle-France, à Québec.

J'ai grandi au château, avec mes frères cadets. Dès mon plus jeune âge j'ai été pris en charge par divers précepteurs également. Il était écrit que je prendrais la suite de sa Majesté mon père sur le trône.

Mes parents sont... aimants. A leur façon.
» dit-il en souriant.

« Quant à mes frères, nous nous sommes lancés il y a bien longtemps dans une petite compétition fraternelle. Qui aura les meilleurs compliments ? A qui la plus jolie fille du bal prêtera son bras ? Qui rapportera le plus gros gibier de la chasse ? Nous nous lancions régulièrement des défis. »

Son regard part dans le lointain. Il remonte le passé, retrouve des souvenirs de chasse, de cavalcades, de boutades et de francs rires.

Comme ses frères lui manquent.

« Ma famille m'a donné tout l'équilibre dont j'avais besoin. Je pense pouvoir dire que j'ai eu une enfance heureuse oui. Sauf peut-être la fois où j'ai avalé une mouche en baillant... » conclut-il en faisant une grimace de dégoût.

« Depuis je ne peux plus bailler sans m'assurer auparavant qu'aucun volatile indésirable n'est dans les parages ! »

Plaisante-t-il ou cela lui est-il réellement arrivé ? L'histoire ne le dit pas.

« Est-il vrai qu'à Venise on ne peut se déplacer qu'en bateau ? Vous qui n'aimez pas naviguer... Vous n'avez pas du beaucoup vous promener dans les rues de Venise ! »

Il espère alors qu'elle lui parlera de son adolescence, de ses amis là-bas, de ses fugues peut-être. Car oui, depuis Saint-Pierre-Port, il connait ses talents de fugueuse !
Victoria
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Message par Victoria Mer 11 Jan - 12:21

"L'absence est trop cruelle"

Les fiançailles de Paul et Victoria
Avril 1656

La jeune fille n'a pas de rendrez-vous, ne sait même pas si Paul sera disponible, voire même présent au Palais. Elle déambule dans les longs corridors du somptueux édifice en se demandant encore si elle fait bien de se présenter devant lui aujourd'hui. De longues semaines se sont écoulées lentement, douloureusement par cette cruelle absence depuis leur déjeuner sur l'herbe. Un moment magique qu'elle n'est pas prête d'oublier et qui lui a fait prendre conscience de tant de réalités qu'elle s'en est effrayée. Comment peut-elle envisager de partager la vie du Régent de France de façon pérenne ? Il tient le Royaume de France et tous ses sujets entre ses mains, a de lourdes responsabilités et ne doit probablement pas avoir la tête à ses préoccupations de demoiselle énamourée. Victoria a toujours été discrète, peut-être trop mais elle est ainsi faite, voilà pourquoi elle a choisi de s'effacer. Du moins : pour un temps.

Pourtant ce matin, après de longues journées d'absence, elle avance avec hésitation certes, mais plutôt déterminée à revoir le visage de son aimé et à lui demander pardon de l'avoir laissé sans nouvelles. Elle n'a pas vraiment d'excuses et ne cherchera pas à en trouver car alors cela reviendrait à mentir et le mensonge avec Paul est inenvisageable. Sa seule motivation pour se tenir loin de lui n'a été que la peur de le voir disparaître à tout jamais car leur rang respectif l'imposait. Oui mais voilà, Victoria ne conçoit pas sa vie sans Paul. Aussi, après s'être tourmentée des nuits et des jours durant, entreprend-elle cette démarche aujourd'hui.
Le revoir, replonger ses grands yeux dans ceux si doux et tendres, entremêler ses doigts aux siens, se gorger de cet amour qui est et restera l'unique jusqu'à la fin des temps et surtout ne rien lui demander ou espérer. Le revoir pour reprendre quelques forces, pour se nourrir de lui, pour se blottir sans ses bras aimants, pour se fabriquer d'autres merveilleux souvenirs et puis, s'il le faut, elle repartira, mais cette fois pour toujours. Hélas.

Arrivée devant la lourde porte du bureau du Régent, les huissiers la reconnaissent, lui sourient et lui indiquent que Paul est à son bureau, au travail depuis l'aube. Elle lui a apporté le fruit de ses premières récoltes : un vin doux dont l'étiquette porte le nom de "Passion" : comme la passion aussi violente et puissante que tendre et douce qu'elle éprouve pour lui. Le vin destiné à vieillir est en fûts et ne pourra pas être consommé avant quelques mois.

La porte à double battant s’ouvre alors, le crieur annonce d'une voix ferme :


- Mademoiselle Victoria Falcone di Cagliostro


Victoria entre et exécute à la perfection les trois petits pas protocolaires avec une révérence. La dernière révérence est marquée et la voit courbée avec grâce, tête baissée légèrement. Sous son manteau d'hiver entre-ouvert l'on peut sans doute voir que sa poitrine se soulève avec précipitation ...


P. Chesnay-Taillandier a écrit:Paul est soucieux.

Depuis combien de temps n'a-t-il pas pensé à ce qu'il doit dire ou faire ?

Il est fatigué, inquiet.

Et cette neige qui tombe sans cesser, ce froid qui s'insinue, tel le doute, partout.

Réussira-t-il à être un bon régent finalement ?

Il a conscience qu'on peut lui reprocher bien des choses. Et il veut y remédier.

C'est à ça qu'il travaille depuis l'aube.

Jusqu'à ce que...

Jusqu'à ce qu'on lui annonce l'improbable...

Jusqu'à ce que l'improbable se matérialise sous ses yeux, toujours aussi belle, comme un souvenir, presque un rêve.

Paul la regarde s'avancer, s'incliner, s'avancer, s'incliner, puis encore une fois, s'avancer, s'incliner, et rester ainsi.

Il reste un moment interdit. Il ne sait comment réagir.

Puis il se lève et d'un pas ferme ouvre la porte de son bureau.

Envisage-t-il de le quitter et de la laisser sans un au revoir, comme elle l'a fait ?

Non. L'absence est trop cruelle.

Il prévient l'huissier qu'il ne veut être dérangé que si la Royauté est en danger imminent.

Puis il referme la porte et observe à nouveau Victoria, toujours courbée.

Il ne veut pas se laisser guider par ses émotions. Pas maintenant.

Alors il se place devant sa fenêtre et regarde les flocons tomber en silence.

Seul le crépitement du feu se fait entendre.

Puis finalement Paul se retourne, les bras croisés.

Il n'a jamais les bras croisés. Il est sur la défensive.

D'un ton monocorde, il lui demande alors.

« Où étiez-vous ? »

Comme il lui adresse la parole, elle a le droit de se relever.

Et c'est cet instant qu'il craint le plus.

Car si son regard se veut dur, il est en contradiction avec le tourbillon qui opère jusque dans ses entrailles.

Parce qu'elle est là.

Parce qu'elle est revenue.

Peu importe où elle était et pourquoi.

Elle est revenue.

Tandis que la jeune fille est toujours courbée dans l'attente du mot, de la phrase, du sermon, qui lui permettra de se relever, ce mot, cette phrase, ce sermon, ne vient pas. Défilent alors les secondes et peut-être même les minutes interminables où Victoria attend. Elle attend de savoir dans quel état d'esprit se trouve son tendre Prince. Dans cette position de soumission, elle ne peut qu'entendre le silence, assourdissant. Elle ne peut qu'avoir le cœur à l'envers lorsqu'elle suit les pas de Paul qui se dirige vers la porte. Va-t-il la laisser là sans lui adresser la parole ? Va-t-il demander à ses gardes de la jeter dehors ? Non, ou du moins elle le suppose, car elle entend la porte se refermer avec fermeté et des pas se rapprocher d'elle. Va-t-il lui tendre la main pour l'aider à se relever ? Va-t-il se courber à sa hauteur pour enfin croiser son regard ? Plus le temps passe et plus Victoria pense fermement que sa fin est proche, qu'elle va être disgraciée, rejetée, ignorée. Elle ne pourra alors s'en prendre qu'à elle-même et n'aura pas l'occasion d'expliquer pourquoi elle a préféré se tenir à distance de celui qu'elle aime par dessus tout.

Les pas de nouveau s'éloignent d'elle et marquent un long arrêt devant l'une des fenêtres du cabinet de travail du Régent. Le silence continue d'être pesant, à un point tel, qu'entre deux crépitements du feu de cheminée, les battements de son cœur doivent probablement raisonner dans la grande pièce et ajouter à la peur qu'elle a de perdre Paul. De longues minutes s’égrainent encore sans qu'aucun signe ne lui soit donnée. Puis, enfin, de nouveau, les pas se rapprochent d'elle et quelques mots, trois mots très exactement, lui sont adressée. Paul est à présent si près d'elle, qu'elle peut sentir quelques fragrances discrètes de son parfum.

Alors et puisque permission lui est donnée avec ces trois mots, Victoria se relève et ne peut s'empêcher d'aller se noyer dans les yeux de son Prince. Ne dit-on pas que les yeux, le regard, sont le miroir de l'âme ? Va-t-elle pouvoir la sonder cette âme tant aimée ? Elle évite soigneusement de s'attarder sur les bras croisés qui peuvent signifier de la colère, du retrait, de la méfiance. Elle préfère ne pas quitter les yeux de son aimé, tandis que d'une voix timide, elle lui répond.


Sur mes terres, votre Altesse Sérénissime. J'étais sur mes terres, pas loin, à travailler durement pour ma première récolte.


Sa petite main tenant le panier où repose la bouteille de vin doux se lève alors afin de lui offrir son présent. La jeune fille n'a pas quitté des yeux celui qui est tout pour elle. Pas un instant. Cette offrande tendue sera-t-elle acceptée ? Il ne s'agit pas seulement de cette bouteille, bien évidemment, mais d'elle toute entière qui n'attend que d'être enveloppée, noyée, happée, des bras rassurants et protecteurs de Paul. Faiblement, car elle a si peur de la sentence à venir et de la main princière qui ne se tendrait pas vers elle en retour, elle ajoute en baissant la tête humblement, sa petite main toujours tendue et chargée de son panier :

Pardon ... Je vous demande pardon.



P. Chesnay-Taillandier a écrit:Victoria plonge ses yeux dans les siens.

Et son corps le trahit.

Son coeur se sert tellement qu'il en a presque le souffle coupé.

Ses pupilles se dilatent en réaction à l'attirance qu'il éprouve pour elle et qu'il ne peut cacher.

"Votre Altesse Sérénissime" ?

Il n'est plus "Paul", celui que seule elle appelle comme ça en Royaume de France et de Navarre ?

Son coeur se désagrège.

L'aurait-elle rejeté en s'éloignant de lui ? Ne veut-elle plus de cette relation qu'ils avaient entamé ? Ne veut-elle plus de son amour ?

Il a tellement mal qu'il voudrait qu'elle parte.

Mais ce n'est pas ce qu'elle fait.

Au contraire...

Elle lui tend quelque chose. Un panier. Auquel il n'avait prêté aucune attention jusque là.

Il baisse les yeux pour comprendre de quoi il s'agit.

C'est à ce moment précis qu'elle lui demande pardon.

Instantanément son coeur brisé se gonfle et reprend vie, reprend espoir.

Il tend alors la main vers elle et se saisit de son poignet pour l'attirer contre lui.

Qu'importe le panier, c'est d'elle dont il a besoin.

S'autorisant une proximité qu'il n'avait jamais osé jusque là, Paul enfouit son visage dans le cou de Victoria et la serre contre lui avec autant de tendresse que de désir.

Après avoir inspiré profondément son odeur pour s'en imprégner, ses lèvres se posent dans le cou de Victoria et l'embrassent.

Son désir est ardent, sa passion dévorante.

Peut-être va-t-il trop loin... Peut-être a-t-il mal compris... Peut-être va-t-elle le rejeter...

Comment lui faire comprendre qu'il la veut sienne ? Que seul le respect qu'il a pour elle le retient ?

Tous les mots ne valent rien.

Sauf peut-être un. Toujours le même.

« Enfin... » laisse-t-il échapper dans un souffle chaud.

L'attente est longue, si longue, que sans qu'il le sache, Paul vient déjà de lui infliger sa punition. Toujours ployée en grande révérence toutes lés émotions ont défilé dans la tête de Victoria : le rejet, l'indifférence, le mépris. Elle s'est sentie en proie à la peur de ne plus jamais pouvoir partager ces moments d'intimité qui sont ceux qu'ils goûtaient tous deux jusqu'à ce que ... Elle décide de s'éloigner pour ne pas souffrir et pour qu'elle ne représente pas un frein à l'ascension de cet homme à la tête du Royaume de France et de Navarre.

Contre toute attente, sa petite mimine est enfin délicatement saisie et tout son corps est enveloppé par celui sans qui elle ne sait plus respirer. La tension se relâche, la peur s'efface, l'espoir renaît. Comment a-t-elle pu douter ? Sans doute est-ce d'elle qu'elle a douté. Il n'est plus temps de ressasser, ce qui est fait est fait. Victoria préfère à présent savourer ce rapprochement des corps, cet émoi incroyable qui la saisit toute entière lorsque la bouche princière vient se perdre dans son cou en de chauds et passionnés baisers. La tête lui en tourne presque tant Paul se montre convaincant. Elle réalise d'ailleurs, que c'est la toute première fois qu'ils sont à ce point proches, collés-serrés l'un et l'autre. Pour la jeune fille c'est une première en tout : ce rapprochement aussi intime, ces baisers dans son cou qui se tend pour en quémander d'autres. Ce sera aussi la toute première fois de sa courte existence où elle décide de se montrer entreprenante. Ce "Enfin" lui donne toutes les audaces que jusqu'alors elle n'imaginait pas pensables. Ces mains enserrent la taille de son Prince, sa poitrine se gonfle de désir tout contre le torse puissant et sa bouche va chercher celle de son Aimé. Une bouche qui va boire à la fontaine princière jusqu'à s'étouffer d'envie et de retard à combler. Entre chaque baiser donné, quelques mots viennent caresser l'oreille de Paul.


Mio Paolino, più mai non vi lascerei.*


Peu lui importe à présent le quand dira-t-on, elle sent que tout son corps veut se fondre en Paul. Elle ne sait comment il faut s'y prendre. Elle va se laisser conduire par celui qui sera son Maître. Elle n'a plus peur et n'espère qu'une seule chose : devenir celle dont Paul ne pourra plus jamais se passer. Afin de lui signifier son accord et son désir grandissant, elle ose glisser l'une de ses mains entre le tissu et la peau douce du buste princier après avoir déboutonné, habilement, quelques crans de la chemise princière. Ses lèvres viennent se poser en un doux râle de désir sur la peau chaude et divinement parfumée de Paul.

Je suis à vous si vous voulez de moi.
Vi amo a morire ne.*


Ses grands yeux se ferment sur cette déclaration plus sincère que tous les aveux réunis, tandis que sa bouche gourmande voyage sur cette peau qui l'appelle ...





* Mon Paolino, plus jamais je ne vous laisserais.
* Je vous aime à en mourir.


P. Chesnay-Taillandier a écrit:Victoria répond à son envie d'elle en s'offrant à lui.

Elle ne le rejette pas.

Il a bien compris.

Il ne va pas trop loin.

Ne vont-ils pas trop loin ?

Elle lui susurre quelques mots à l'oreille. En italien...

Paul ne comprend pas l'italien.

Il ne comprend que "mio paolino".

Ça ressemble à une promesse. Ou un aveu. Ou une confession. Quelque chose d'intime.

Mais l'instant balaie les questionnements.

Une main se glisse sur son torse et Paul en a le souffle coupé.

Littéralement.

Ses yeux se ferment, son corps se tend et il se mord la lèvre pour ne pas perdre la tête.

Elle le rend fou.

Et en une phrase elle réduit à néant tous ces efforts pour garder son calme.

Il a tellement envie d'elle qu'il pourrait en mourir.

Ses mains se placent alors de part et d'autres des hanches de Victoria pour la soulever et l'amener sur son bureau.

Ainsi, elle est à sa parfaite hauteur.

Puis ses mains remontent, s'attardant sur les formes de Victoria, le torturant toujours plus.

Victoria a-t-elle conscience qu'elle est la première femme qu'il ait jamais aimé ?

La première femme qu'il ait jamais désiré à ce point ?

Sa première ?

Il est conscient que nombre de nobles, y compris chez ses prédécesseurs, ne s'embarrassaient pas de questions et n'hésitaient pas à prendre sans sourciller ce qui leur était offert.

Stupide, dirait-on de l'homme qui s'y refuse.

Et pourtant...

La main droite de Paul vient se poser sur la joue de Victoria et l'amène à le regarder dans les yeux.

Sa voix est bien plus rauque que d'habitude.

« Depuis bien longtemps, vous hantez mes pensées et me rendez fou. Vous avez mon coeur. Vous avez mon âme, Victoria. Faites-moi confiance, je vous en supplie. Je vous ferai mienne, je vous le promets. »

Son regard est lourd de sens, sincère.

Il joint le geste à la parole.

Sa main libre tâtonne et trouve dans le tiroir de son bureau le petit coffret qu'elle cherche.

Sa main droite quitte alors la joue de la jeune femme. Son regard se porte sur le coffret pour l'ouvrir dans le bon sens.

Celui qui permet à Victoria d'y découvrir une bague.

Sertie de trois diamants taillés en rose en son sommet, placés telles des fleurs entre deux feuilles émanant de deux cornes d'abondance, emplies à leur tour de diamants taillés en rose de moindre taille.

Sa gorge se serre au moment de prononcer les mots d'une vie.

« Cette bague vous est destinée Victoria.

Je suis à toi, si tu veux de moi...
» reprend-il dans un murmure, rivant à nouveau son regard sur Victoria.

Le désire-t-elle autant qu'il la désire ? Ou va-t-elle prendre peur devant l'engagement qu'il lui propose ?

Son ventre fait des noeuds. Et si elle prenait peur ?
La jeune fille a le souffle coupé de pouvoir s'imprégner au plus près de cette peau masculine dont elle a rêvé si souvent. Elle n'a pas conscience, sur l'instant, de se montrer sans doute un tantinet entreprenante et presque coquine dans l'élan qui est le sien. Il sera bien temps, lorsqu'elle le réalisera, qu'elle aille se cacher pour ne pas exhiber les tons de rouge pivoine ou ceux ressemblant à un vaste champ de coquelicots. Leur séparation lui fut par trop cruelle alors même qu'elle seule en est à l'origine. Comment ne pas s'en vouloir ? Alors Victoria veut pouvoir rattraper cet impardonnable retard dans tous ces moments qu'ils n'ont plus eus.

Avec délicatesse et fermeté mêlées, la jeune fille se sent soulevée par la taille et posée sur le bureau de son Prince. D'abord étonnée, elle se situe dans la pièce en regardant à droite, puis à gauche pour enfin sonder Paul du regard. Elle lui sourit tendrement lorsqu'elle comprend qu'il est tout aussi troublé qu'elle ne l'est. Ils n'ont jamais abordé leur situation amoureuse passée. Du reste, Victoria serait bien en peine de pouvoir en dire grand chose, car au Palais des Doges à Venise, si elle ne manquait pas de prétendants, jamais, ô grand jamais, elle n'a encouragé quiconque pas plus qu'échangé le moindre petit geste amoureux, se préservant pour l'unique, pour celui qui serait l'homme de sa vie. L'homme de sa vie s'incarne à présent en un seul homme : PAUL.

Le geste doux qui conduit son visage à se placer à même hauteur que celui de son Prince la trouble. Terriblement mais délicieusement. Leurs souffles sont si proches qu'ils pourraient presque s'unir dans l'instant par un baiser passionné ardemment désiré de part et d'autre. Paul lui, semble tâtonner de sa main libre en cherchant elle ne sait trop quoi. Victoria n'ose pas suivre cette main chercheuse et se contente d'admirer les traits fins et racés de son Prince, suspendue à son souffle chaud et à cette autre main lui maintenant délicatement le visage.

Puis, la main droite princière quitte son visage et va rejoindre la main chercheuse pour lui présenter un petit coffret qui s'ouvre magiquement sous ses yeux ébahis. A cet instant, Paul peut sans doute voir que la bouche de Victoria prend la forme d'un beau O majuscule et que ses grands yeux s'agitent du coffret ouvert sur une splendeur étincelante aux yeux de Paul, plusieurs fois de suite. La bague présentée est fine, merveilleusement ouvragée et dotée de diamants précieux et rares. Plus que la beauté de la bague, Victoria est saisie par la beauté du geste. Comprend-elle bien ce qui se joue là ? Un instant, elle hésite à y croire et puis très vite, elle réalise que leur relation est sans doute en train de prendre un tournant officiel. Cela pourrait l'effrayer, il est vrai, mais follement amoureuse de Paul, totalement consciente des grandes qualités de l'homme de pouvoir, elle ne peut que se dire qu'elle doit lui faire confiance, qu'il n'est pas homme à s'engager à la légère et encore moins à n'avoir pas finement analysé et mesuré ce que cet engagement pouvait induire pour elle, pour lui, pour l'avenir. Alors, confiante pleinement en cet avenir que Paul lui dessine sous des mots si doux et si prometteurs, elle ne peut que répéter derrière lui et avec une assurance qui la surprend elle-même :


Je te veux et je suis à toi.

Elle ne sait pas trop ce qu'elle doit faire ensuite, aussi, un peu tremblante car émue comme jamais, elle tend sa petite menotte à Paul afin qu'il place la bague qui va sceller leur destin commun.



P. Chesnay-Taillandier a écrit:Le tir demande une maîtrise de soi et de ses émotions.

Une main qui tremble, c'est une biche qui s'enfuit après que la flèche lui ait sifflé aux oreilles sans l'atteindre.

Et si la flèche est sur le point d'atteindre le coeur de la belle, la dextérité du chasseur, elle, est bien loin.

C'est à peine si Paul arrive à contrôler son stress face à cette situation.

Mais Victoria reste Victoria. Quoi qu'il puisse arriver.

Toujours aussi spontanée. Toujours aussi vraie.

Jamais en apparence. Elle reste le livre ouvert qu'il a toujours connu et apprécié.

Elle aussi semble un peu stressée et nerveuse.

Elle aussi veut aller plus loin à ses côtés.



« Je te veux et je suis à toi. »


Une chaleur intense se diffuse instantanément dans tout le corps de Paul.

C'est ça. Cette sensation. C'est ça qu'on appelle l'amour.

Ce sentiment d'accomplissement le plus intense, le plus jouissif.

C'est du bonheur à l'état pur qui coule dans ses veines.

Il retire alors la bague de son coffret.

De sa main gauche, il prend délicatement celle de Victoria.

De sa main droite, il fait glisser la bague au doigt de la jeune femme.

Puis il relève les yeux vers elle, vers celle qui n'a pas son pareille pour le tourmenter et qui n'est pas prête d'arrêter.

Et pour la première fois, du moins lui semble-t-il, il ose prononcer la formule consacrée.

« Je vous aime, Victoria. »

A la fougue des retrouvailles succède alors un long baiser plein de tendresse et d'amour.

Son front se pose contre celui de Victoria et, dans ce cocon d'intimité, il lui explique comment les choses vont devoir se passer désormais.

« Je dois informer mes parents. Obtenir leur aval. Et vos parents également.

En attendant, nous ne devons rien changer à notre quotidien.

Si ce n'est éviter d'autres éventuelles fugues pour aller retrouver un groupe de corsaires dans des lieux peu fréquentables...
» dit-il en souriant, faisant référence à l'épisode cuisant qu'il avait vécu à Saint-Pierre-Port en suivant la jeune femme jusqu'à une auberge bien mal famée.

« Le moment venu, nous pourrons alors laisser libre cours à nos sentiments, tous... » lui promet-il, le coeur déchiré entre la bienséance et son envie d'elle.

Secrètement, il se fait une promesse : quand ce jour viendra, il mettra tout en place pour que ce soit l'un des plus beaux qu'il puisse lui offrir. Que son seul souvenir laisse un sourire impérissable sur ce beau visage.

Tout son être est comme assailli de frissons dus à l'intense émotion qui l'enveloppe. Ses grands yeux ne perdent pas une miette de ce qui se déroule ici et maintenant. L'instant est solennel, réellement sacré et elle doit pouvoir s'en souvenir jusqu'à son dernier souffle. Victoria doit pouvoir se rappeler à chaque instant, de l'émotion qui transpire de chaque parcelle de la peau de Paul ainsi que de ses gestes doux mais déterminés, de sa petite main à la peau blanche qui se trouve délicatement saisie par celle de son Prince et de cette magnifique bague qui trouve sa place au doigt de la jeune fille. Elle ne devra jamais oublier cet échange véritablement amoureux des regards, ces mots uniques, d'une vie, prononcés par Paul, ces fronts qui s'unissent et leurs souffles qui se mêlent à l'unisson en un baiser. Leur premier long et tendre baiser de jeunes fiancés.

Victoria peut à présent rendre son dernier souffle, ce qu'elle n'espère évidemment pas, mais si cela arrivait, elle y serait prête se sachant aimée pour toujours par celui qu'elle a aimé dès le premier regard. Ce jour là, il y a à peu près deux ans, son instinct ne s'est pas trompé : elle savait que Paul serait l'unique homme de sa vie. Il est vrai qu'entre-temps, il lui est arrivée de douter, non pas de ses sentiments pour Paul mais de sa capacité à pouvoir devenir l'unique, l'élue de son cœur. C'est aujourd’hui un vœu réalisé. Victoria est comblée, terriblement éprise et véritablement sereine quant à cet amour partagé.

Ils ne devront rien changer à leurs habitudes lui explique Paul. Elle le comprend et ne s'en étonne pas, son aimé n'est pas n'importe quel homme et ils se doivent tous deux de ne jamais l'oublier. Victoria réalise soudain que quoi qu'elle en pense, quoi qu'elle veuille : il lui faudra apprendre à partager Paul avec tous ses autres sujets. Elle devra toujours avoir une conduite exemplaire, ce qu'au fond, elle n'a jamais cessé d'appliquer, jour après jour, depuis son arrivée en terres de France.

C'est lorsque la réalité se rappelle à elle, qu'elle prend conscience que tout n'est pas gagné. Paul va devoir demander l'aval de cette union à ses parents ! Oui, bien sûr, mais qu'en penseront-ils ? Seront-ils prêts à l'accepter ? Victoria leur semblera-t-elle assez remarquable et de naissance suffisamment noble pour partager la vie de leur fils ? Voilà qu'elle se raidit légèrement en y songeant et que des obstacles sont encore à venir si la jeune fille ne correspond pas aux attentes et souhaits des parents de Paul.


Oui, je comprends et j'espère être celle que vos parents souhaitent pour vous.


Son père à elle sera honoré de savoir son unique fille être la promise du Régent de France même si Victoria sait parfaitement que la séparation définitive entre le père et sa fille, l'espoir d'un retour à Venise auprès de lui, s'éteindront de fait avec cette union et que son père en souffrira. Pour sa mère ici en France, elle ne sait trop, ne la connaissant pas suffisamment mais il lui semble qu'elle aussi devrait être honorée à la perspective d'une telle union.

Victoria ne peut retenir un petit rire lorsque Paul lui rappelle leur escapade folle à Saint-Pierre-Port. Comment l'oublier ? Comment ne pas se souvenir que ce voyage les a tous deux irrémédiablement rapprochés ?


Nous ne fuguerons plus à présent : que tous les deux !
Ose t-elle lui répondre de son petit air espiègle.

Cet instant solennel se termine sur une vie à deux pleine de promesses, de la bouche même de Paul : ils pourront laisser libre cours à tous leurs sentiments. Comment Victoria pourrait-elle ne pas être la plus heureuse des jeunes filles de ce monde avec cette fin tant attendue et digne des plus grandioses contes de fées ?

Victoria
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